Voir la source de Bucovine

{{coord|48|00|N|26|00|E|source:kolossus-nowiki|display=title}}
{{Infobox Ancienne entité territoriale
| nom français = Bucovine
| nom         = Буковина ([[Ukrainien|uk]])<br>''Bucovina'' ([[Roumain|ro]])
| année début = 1775
| année fin   = 1918
| blason      = Coat of arms of Bucovina.svg
| carte       = Empire d'Autriche 1914 Bucovine.png
| légende     = Le duché de Bucovine au sein de l'Autriche-Hongrie (1914).
| gouvernement  = [[Duché]]<small><br>- [[Terre de la Couronne]] de l'[[Fichier:Flag of the Habsburg Monarchy.svg|20px]] [[Empire d'Autriche]] (1849–1867) et de la [[Cisleithanie]] au sein de l'[[Fichier:Ensign of Austro-Hungarian civil fleet (1869-1918).svg|20px]] [[Autriche-Hongrie]] (1867-1918)</small>
| capitale    = [[Tchernivtsi]] (Чернівці)
| superficie  = {{Nombre|10442|km|2}} 
| population  = [[Roumains]], [[Magyars]], [[Ruthènes|Ukrainiens]], [[Polonais de Bucovine|Polonais]], [[Juifs de Bucovine|Juifs]], [[Roms]], [[Sicules de Bucovine|Sicules]], [[Allemands de Bucovine|Allemands]]
| evt1 date   = {{s-|XIV|e}}
| evt1        = ''Țara de Sus'' de la [[principauté de Moldavie|Moldavie]]
| evt2 date   = 1775
| evt2        = rattachement à la [[monarchie de Habsbourg]]
| evt3 date   = 1849
| evt3        = [[Terre de la Couronne]] (''Kronland'') de [[Cisleithanie]]
| evt4 date   = 1918
| evt4        = rattachement au [[royaume de Roumanie]]
| evt5 date   = 1940
| evt5        = annexion du Nord par l’[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]]
| evt6 date   = 1968
| evt6        = le Sud devient [[județ de Suceava]] en [[Roumanie]]
| p1          = [[Fichier:Coat of arms of Moldavia.svg|20px]] [[Principauté de Moldavie]]
| s1          = [[Fichier:Flag of Romania.svg|20px]] [[Royaume de Roumanie]]
}}

La {{Terme défini|Bucovine}} (en {{lang-uk|Буковина}} ''Boukovyna'', en {{lang-ro|''Bucovina''}}, en {{lang-de|''Bukowina''}} ou ''Buchenland'') est une [[région historique]] de {{Nombre|10442|km|2}} délimitée en [[1775]] qui s'étend dans l'espace frontalier de l'[[Europe centrale]], de l'[[Europe de l'Est]] et de l'[[Europe du Sud-Est]]. La moitié Nord avec {{Nombre|5713|km|2}} est en [[Ukraine]] depuis la [[dislocation de l'URSS]] en [[1991]] (il forme depuis 1940 la majeure partie de l’[[oblast de Tchernivtsi]]) et le Sud avec {{Nombre|4729|km|2}} en [[Roumanie]] (formant la majeure partie du [[județ de Suceava]]).

Pendant des siècles, la région a formé le cœur historique du « Haut Pays » (''Țara de Sus'') de la [[principauté de Moldavie]], adossé aux [[Carpates]] du nord-est et comprenant les collines avoisinantes. Elle a été intégrée dans la [[monarchie de Habsbourg]] de 1775 à [[1918]], devenant [[multiethnique]], puis rejoignit le [[royaume de Roumanie]] à l'issue de la [[Première Guerre mondiale]], avant d'être scindée en deux en [[1940]] entre la Roumanie et l'URSS en application du [[pacte germano-soviétique]].

== Dénomination ==
La région est le noyau originel de la [[Principauté de Moldavie|Moldavie]]. Elle faisait partie de la ''Țara de Sus'' (« Haut-Pays »), en opposition à la ''Țara de Jos'' (« Bas-Pays »), zone sud, aux altitudes plus basses, de la [[Moldavie (région historique)|Moldavie]]. Elle fut cédée en [[1775]] par le [[Sublime Porte|sultan de Constantinople]], suzerain des [[hospodar]]s de Moldavie, aux [[Habsbourg]] d’[[Empire d'Autriche|Autriche]] en remerciement pour leur neutralité dans la [[guerre russo-turque de 1768-1774]] et au mépris du traité de vassalité liant la Moldavie à l’Empire ottoman, qui garantissait l’intégrité territoriale de la Moldavie. Le [[Liste des souverains de Moldavie|prince de Moldavie]], [[Famille Ghica|Grigore Ghica]], proteste contre la cession de ce territoire moldave, si bien que l’Autriche fait pression sur le sultan, afin de le destituer. Les Ottomans vont plus loin : ils le font décapiter le {{Date|1|septembre|1777}}.

Le nom de ''Bukowina'' fut donné par les [[Habsbourg]] à cette partie du ''Haut Pays'' en [[1775]] lors de l’annexion de la région à [[Empire des Habsbourg|leur empire]]. C’est un nom [[Langues slaves|slave]] signifiant « [[Fagus sylvatica|hêtraie]] ». L’équivalent en [[allemand]] : ''das Buchenland'', utilisé plutôt en poésie, signifie « pays des hêtres ».

Officielle sous la domination autrichienne, la dénomination ''die Bukowina'', dérive d’un terme [[polonais]], choisi parce que de 1775 au milieu du {{XIXe siècle}}, la Bucovine fut intégrée à son voisin, le [[royaume de Galicie et de Lodomérie]], territoire [[République des Deux Nations|polonais]] annexé trois ans auparavant par l’Autriche. Or le gouvernement de la Galicie-Lodomérie était, selon la volonté explicite des [[Habsbourg]], administré par des fonctionnaires de l’Empire et par la [[noblesse polonaise]] locale. [[Vienne (Autriche)|Vienne]] encouragea la [[noblesse polonaise]] à administrer et peupler aussi la Bucovine, afin d’accroître l’influence du [[catholicisme]] (religion des Habsbourg et des Polonais) face à l’[[Église orthodoxe|orthodoxie]] des [[Moldaves]]<ref>Ion Nistor, {{ro}} ''Istoria bisericii din Bucovina'' (« Histoire de l'église de Bucovine »), Socec, Bucarest 1916, et {{de}} ''Der nationale Kampf in der Bukovina'' (« La lutte nationale en Bucovine »), Cernăuţi 1918.</ref>.

== Histoire ==
[[Image:Partitions of Moldavia.jpg|thumb|right|255px|Place de la Bucovine dans les partages successifs de la [[Principauté de Moldavie|Moldavie]] (1775-1812 à 1918, puis 1940 à nos jours).]]

=== Histoire ancienne ===
L’implantation humaine date du [[paléolithique]], mais, en dehors des vallées des principaux cours d’eau ([[Siret (rivière)|Siret]], [[Tcheremoch|Ceremuș]], [[Prout (rivière)|Prut]], [[Moldova (rivière)|Moldova]]…), elle a été sporadique en raison des [[Changement climatique|variations du climat]] et d’[[Invasions barbares|invasions]] venues des [[steppe]]s de l’Est ([[Peuple cavalier|peuples de cavaliers nomades]]), les deux phénomènes étant liés. La végétation aussi a évolué selon ces aléas : lors des périodes plus humides à peuplement sédentaire, les forêts (''codri''), les prés (''pășuni'') et les cultures (''ogoare'') progressaient, tandis que lors des périodes froides ou sèches à passage de peuples nomades, elles reculaient. À chaque période défavorable, les populations autochtones, à commencer par les [[Daces|Gétodaces]] et parmi ceux-ci, les [[Carpes|Carpiens]] (qui ont laissé leur nom aux [[Carpates]], ''carpa'' signifiant « roche » en [[Thraces|thrace]]) et en finissant par les [[Moldaves]] [[Roumains et roumanophones|roumanophones]] actuels, se sont réfugiées en amont des vallées (plus arrosées en raison de leur altitude), puis, les pluies revenues, ont repeuplé le pays en creusant des puits et en refondant des villages et des villes, tout en assimilant au passage les minorités installées lors des invasions<ref>Gheorghe Postică, Civilizaţia veche din Moldova (« L'ancienne civilisation de Moldavie »), éd. Ştiinţa, Chişinău 1995, {{ISBN|5-376-01634-X}}.</ref>.

La [[christianisation]] diffuse lentement alors que défilent les peuples en [[Migration humaine|migration]] : [[Goths]], [[Huns]], [[Avars]], [[Slaves]], [[Proto-Bulgares]] et [[Alains]], [[Iazyges]] ou [[Iasses]] qui laissent leur nom à la ville [[Moldaves|moldave]] de [[Iași]] ou Jassy et au comitat hongrois de Jasz. Après que [[Carpes]] et Iazyges aient eux aussi migré vers le sud-ouest, arrivent au {{IXe siècle}} les tribus [[Magyars|magyares]] tandis que se forme à l’Est, dans le bassin du [[Dniepr]], la [[Rus' de Kiev]]<ref>Nicolae Chetraru, Din istoria arheologiei Moldovei, ed. Știința, Chișinău 1994, {{ISBN|5-376-01636-6}} ; les cartes nationalistes russes ou ukrainiennes montrent la [[Rus' de Kiev]] s'étendant jusqu'en Moldavie ([https://multiring.ru/eor/html/1827/item1/index.html], [http://uahistory.info/2013/01/22/svjatopolk_okajannijj.html]), les autres montrent les [[Ancienne Grande Bulgarie|Bulgares]], les [[Valaques]], les [[Iasses]], les [[Pétchénègues]], les [[Coumans]] conformément aux sources.</ref>.

L’avant-dernière grande invasion ayant dépeuplé le pays (mentionné comme ''loca deserta'' ou ''terra sine incolis'' sur les cartes de l’époque) fut celle des [[Tatars]]/[[Mongols]] au {{s-|XIII|e}}, puis le repeuplement [[Moldaves|moldave]] s'est effectué au {{s-|XIV|e}} à partir de la [[Marmatie]] (qui a légué à la Bucovine et à la [[Moldavie (région historique)|Moldavie]] ses armoiries à tête d'[[aurochs]]). Les populations locales de Bucovine se sont structurées en petits duchés slavo-roumains appelés « canesats » ou « kniezats », en référence aux chefs guerriers slaves (les [[Cnéz|kniaz]]), ou bien « romanies » ou « [[valachie]]s » en référence à la population [[Roumain|romanophone]]. Ces « canesats » sont vassaux des royaumes voisins : soit la [[Royaume de Hongrie|Hongrie]] soit la [[Principauté de Galicie-Volhynie|Galicie-Volhynie]], cette dernière ultérieurement intégrée au royaume de [[République des Deux Nations|Pologne-Lituanie]] au {{XIVe siècle}}. Dans la future Bucovine, le principal duché est celui de [[Baia (Suceava)|Baia]] (la « mine ») aux sources de la rivière [[Moldova (rivière)|Moldova]] (qui donnera son nom au pays appelé en français « [[Moldavie (région historique)|Moldavie]] »).

=== Noyau de la Moldavie ===
[[Fichier:Humor_Monastery,_Bucovina.jpg|thumb|left|Monastère de Humor]]
[[Fichier:Voronet last judgment.jpg|thumb|left|Le ''jugement dernier'', monastère de [[Monastère de Voroneț|Voroneț]] construit en [[1488]].]]
À partir du milieu du {{XIVe siècle}}, la région devient le noyau de le [[principauté de Moldavie]], avec la cité de [[Suceava]] comme capitale en [[1388]] (ce [[Voïvode|voïvodat]] [[Roumain|roumanophone]], vassal mais autonome, est différent des [[voïvodie]]s polonaises, qui ne sont que des provinces du royaume de Pologne, mais l’historiographie polonaise moderne grand public ne s’embarrasse pas de telles nuances). Au début du {{XVe siècle}}, le voïvode moldave cède au roi polonais la [[Pocoutie]], région voisine de la future Bucovine, mais en même temps, cesse d’être vassal de la Pologne. Le voïvode [[Étienne III de Moldavie|Étienne le Grand]] et ses [[Liste des souverains de Moldavie|successeurs sur le trône de Moldavie]] font construire les fameux [[Églises de Moldavie|monastères]], dont la renommée est due à la conservation exceptionnelle des [[fresque]]s non seulement à l'intérieur, mais aussi à l'extérieur : [[Monastère de Moldovița|Moldovița]], [[Humor (monastère)|Humor]], [[Monastère de Sucevița|Sucevița]], [[Arbore]], Pătrăuți, Probota, Suceava et [[Monastère de Voroneț|Voroneț]]{{Note|texte=Sept des ensembles plus représentatifs sont inscrits sur la liste du Patrimoine Mondial de l'Unesco}}. Avec leurs fresques polychromes, ces monastères sont un des trésors culturels de la [[Roumanie]] moderne, et une des sources de revenus de l’[[Église orthodoxe roumaine]].

Pendant les deux siècles qui suivent, la région fait partie du voïvodat de Moldavie, bientôt vassal de l’[[Empire ottoman]]. Elle est fréquemment victime des incursions des [[Tatars]], des [[Cosaques]], des [[République des Deux Nations|Polonais]], des [[Empire russe|Russes]] en [[1769]], et des [[Monarchie de Habsbourg|Autrichiens]] en [[1774]].

=== La période autrichienne ===
[[Fichier:Bucovina.JPG|vignette|gauche|La Bucovine des [[Habsbourg]] (liséré bleu) en 1901 : les noms sont en forme [[allemand]]e.]]
La [[monarchie des Habsbourg]] cherchait depuis 1772 (annexion de la [[Galicie]]) à s'assurer une liaison terrestre entre celle-ci et la [[Principauté de Transylvanie|Transylvanie]]. Après la [[Traité de Koutchouk-Kaïnardji|paix de Koutchouk-Kaïnardji]] mettant fin à la [[guerre russo-turque de 1768-1774]], un traité austro-ottoman du {{date|4|mai|1775}} permet aux Autrichiens d’occuper la partie nord de la [[Principauté de Moldavie|Moldavie]], dès lors appelée ''Bucovine''. Pour justifier son annexion de ce territoire, la [[monarchie des Habsbourg]] invoque le statut de ''{{lang|la|terra nullius}}'' : puisque la [[principauté de Moldavie]] était « [[Église orthodoxe|schismatique]] » et [[tribut]]aire de l'[[Empire ottoman]] [[musulman]], ce n'était donc pas un Etat souverain européen pouvant participer aux négociations entre nations<ref>{{en}} Tomasz Kamusella, ''{{lang|en|Central Europe in the Distorting Mirror of Maps, Languages and Ideas}}'' in ''{{lang|en|The Polish Review}}'' {{vol.|57}}, {{n°|1}}, {{p.|33-94}}, {{lang|en|University of Illinois Press on behalf of the Polish Institute of Arts & Sciences of America 2012}}, [https://www.jstor.org/stable/41557950] {{nobr|{{lang|en|file}} 62}} ; voir aussi [[Gregor von Rezzori]], ''{{lang|de|Maghrebinische Geschichte}}'' in : Lacques Lajarrige, ''Gregor von Rezzori, études réunies'', Centre d'Études et de Recherches Autrichiennes de l'Université de Rouen, Mont-Saint-Aignan 2003.</ref>. La nouvelle frontière austro-moldave marque sur le terrain une suite de « dents de scie » orientées tantôt est-ouest, tantôt nord-sud : aucune contrainte topographique ne l’explique, mais les archives en dévoilent la raison : à chaque « bakchich » autrichien, la commission ottomane chargée de tracer cette frontière s’enfonçait plus loin vers l’est en territoire moldave, mais à chaque protestation du [[hospodar]] [[Grigore III Ghica]] elle revenait vers le sud-ouest, de crainte que la colère du [[Liste des souverains ottomans|sultan ottoman]] [[Abdülhamid Ier]], dont la Moldavie était [[tribut]]aire, ne s’abatte sur elle. L’arbitraire absolutiste aboutit à la mort du [[Liste des souverains de Moldavie|hospodar moldave]], décapité pour avoir protesté<ref>Veinstein et Mihnea Berindei, ''L'Empire ottoman et les pays roumains'', EHESS, Paris, 1987.</ref>{{,}}<ref>Jean Nouzille ''La Moldavie, Histoire tragique d'une région européenne'', Ed. Bieler (2004), {{ISBN|2-9520012-1-9}}.</ref>.
[[Fichier:Chern old.jpg|vignette|Tchernivtsi (''Czernowitz'' en [[allemand]], ''Cernăuți'' en [[roumain]]) autour de 1900.]]
Le recensement autrichien de [[1776]] dénombre près de {{nombre|70000}} habitants, dont 85,33 % [[roumains]] [[moldaves]], 10,66 % [[slaves]] [[ruthènes]] ou [[polonais]], et 4 % d’autres minorités. L’énergique empereur autrichien [[Joseph II (empereur du Saint-Empire)|Joseph II]] décide en 1781 de mieux contrôler ce nouveau territoire : il commence par transférer le siège de l’[[Église orthodoxe roumaine|archevêché orthodoxe moldave]] (alors sous l’obédience du [[patriarcat œcuménique de Constantinople]]) de [[Rădăuți]] (graphie allemande : ''Radautz'') à [[Tchernivtsi|Cernăuți]] (''Czernowitz'', aujourd’hui Tchernivtsi), puis interdit formellement aux [[Moldaves]] d’utiliser [[Roumain|leur langue]] dans l’administration, et installe en Bucovine des paysans [[ruthènes]] et [[Polonais de Bucovine|polonais]] [[galicie]]ns, des [[russes]] [[vieux-croyants]] et des [[Juifs de Bucovine|Juifs]] fuyant les persécutions des [[Empire russe|tsars russes]], des [[Allemands de Bucovine|Allemands]] principalement [[wurtemberg]]eois, des [[Houtsoules]] de [[Ruthénie subcarpatique|Ruthénie]] et des [[Magyars]] ou [[Sicules de Bucovine|Sicules]] [[Transylvanie (région)|transylvains]]<ref>E. Turczynski, {{de}} « Geschichte der Bukowina in der Neuzeit. Zur Sozial- und Kulturgeschichte einer mitteleuropäisch geprägten Landschaft » in ''Studien der Forschungsstelle Ostmitteleuropa an der Universität Dortmund'' n°14, Wiesbaden, 1993</ref>{{,}}<ref>K. Scharr, {{de}} « Historische Region Bukowina. Entstehen und Persistenz einer Kulturlandschaft » in Thede Kahl, Michael Metzeltin, Mihai-Răzvan Ungureanu (ed.), ''Rumänien, Raum und Bevölkerung. Geschichte und Geschichtsbilder. Kultur. Gesellschaft und Politik heute. Wirtschaft. Recht und Verfassung. Historische Regionen'', Wien, Münster, 2006, {{ISBN|3-7000-0593-8}}.</ref>.

Entre les populations autochtones soumises au [[servage]], et les colons plus favorisés, les frictions restent d’abord modérées, les différentes cultures se développent côte à côte et la [[renaissance culturelle roumaine]] va de pair avec le développement de la [[culture ukrainienne]] (dite alors [[ruthène]]) qui, en Bucovine, est plus florissante que partout ailleurs dans l’actuelle Ukraine, grâce au réseau d’établissements scolaires ruthènes, développé dans les campagnes sous l’égide de l’[[Église grecque-catholique ukrainienne]], que les [[Habsbourg]] favorisent au détriment des [[Église orthodoxe|orthodoxes]]. Les [[Allemands de Bucovine|Allemands catholiques]] et les [[Histoire des Juifs en Bucovine|Juifs]] sont les principaux vecteurs et bénéficiaires de l’essor économique du pays ; la culture juive se développe : au {{s-|XIX}}, les bourgs de [[:en:Sadhora|Sadagura]] et de [[Vyjnytsia]] deviennent des centres du [[hassidisme]] avec des [[Dynastie hassidique#Dynasties plus petites|dynasties hassidiques locales]]. Néanmoins, la Bucovine, éloignée des centres économiques d’[[Europe centrale]], reste, au sein de l’[[Autriche-Hongrie]], très « provinciale ».
[[Fichier:The Times history of the war (1914) (14783027022).jpg|thumb|redresse=0.7|La triple frontière de l'[[Autriche-Hongrie]], de l'[[Empire russe]] et du [[royaume de Roumanie]] en 1914, ''The Times history of the war'', 1914.]]
Elle reste sous administration autrichienne jusqu’en [[1918]] mais change quatre fois de régime. [[Confins militaires|Confin militaire]] à ses débuts ([[1776]]-[[1787]]), elle est ensuite intégrée en tant que « ''Kreis'' de Czernowitz » au [[royaume de Galicie et de Lodomérie]] ([[1787]]-[[1849]]) puis devient un duché de l’[[empire d'Autriche]] ([[1849]]-[[1861]]), et pour finir, par la [[Patente de février]] 1861, elle est constituée en « Pays de la couronne » ({{langue|de|texte=''Kronland''}}) avec un gouvernement régional désormais présidé par des [[Liste des capitaines (Landeshauptmann) du duché de Bucovine|aristocrates moldaves, ruthènes ou polonais]] et une assemblée parlementaire (''[[Landtag (historique)|Landtag]]'') siégeant à Czernowitz (Tchernivtsi, Cernăuți), qui devient une « petite [[Vienne (Autriche)|Vienne]] de Bucovine ». Le [[compromis austro-hongrois]] de [[1867]] reconnaît la Bucovine comme l’un des [[royaumes et pays représentés à la Diète d'Empire]] (« Cisleithanie »). Elle dispose de neuf députés dans la chambre basse du [[Reichsrat (Autriche)|Reichsrat]] à [[Vienne (Autriche)|Vienne]]<ref>Turczynski 1993, Scharr 2006, ''Op. cit.''.</ref>.

La compagnie du [[Chemin de fer Lemberg-Czernowitz-Jassy]], fondée en 1864, relie la Bucovine à la Galicie puis à [[Vienne (Autriche)|Vienne]] et à l’[[Empire allemand]] vers l’Ouest, ainsi qu’au [[royaume de Roumanie]] et à la [[mer Noire]] vers le Sud. Les échanges se développent. À la fin du {{s-|XIX}}, sur insistance de la hiérarchie [[Église orthodoxe roumaine|orthodoxe]], le [[roumain]] est autorisé à nouveau mais les [[Moldaves]] restent marginalisés et n’ont que difficilement accès à l’[[Université nationale de Tchernivtsi|université François-Joseph de Czernowitz]], fondée en 1875, qui devient un bastion de la culture germanique autrichienne<ref>Ion Nistor, {{ro}} ''Istoria Bucovinei'' (« Histoire de la Bucovine »), Ed. Humanitas, Bucarest 1991.</ref>.

=== La période roumaine ===
Pendant la [[Première Guerre mondiale]], se déroulent [[Front de l'Est (Première Guerre mondiale)|plusieurs batailles entre les armées austro-hongroise, allemande et russe]], et l’armée russe finit par se débander en [[1917]], pendant la [[révolution russe]]. Depuis [[1878]], les [[Moldaves]] de Bucovine (deux tiers de la population bucovinienne) évoquaient leur rattachement à la Roumanie désormais indépendante, arguant qu’ils étaient les [[Peuple autochtone|indigènes]] de cette province qui, en tant que noyau originel de la [[Principauté de Moldavie|Moldavie]], comprend beaucoup d’œuvres d’art et de monuments historiques moldaves. C’est pourquoi, lors de la [[Chronologie de l'Autriche-Hongrie|dislocation de l’Autriche-Hongrie en 1918]], l’assemblée de Bucovine où les Moldaves sont majoritaires, vote son rattachement à la [[Royaume de Roumanie|Roumanie]], nonobstant les objections et revendications d’une partie des germanophones et des [[Ukrainiens]] (un cinquième de la population bucovinienne) qui proclament leur adhésion à la [[République populaire d'Ukraine occidentale]]).

Pendant les guerres antibolchéviques [[Guerre soviéto-polonaise|soviéto-polonaise de 1919-1921]] et [[Guerre hungaro-roumaine de 1919|hungaro-roumaine de 1919]], les autorités [[Deuxième république de Pologne|polonaises]] et [[Royaume de Roumanie|roumaines]], soutenues respectivement par les missions françaises [[Mission militaire française en Pologne|Faury]] et [[Mission Berthelot|Berthelot]], craignent que le [[Russie soviétique]] et la [[République des conseils de Hongrie|Hongrie bolchévique]] ne fassent leur jonction à travers la Bucovine, la [[Pocoutie]] et la [[Ruthénie subcarpathique|Ruthénie]] : la {{8e}} division roumaine des généraux Jacob Zadik et Nicolae Petală, et la {{4e}} division polonaise du général Franciszek Kraliczek-Krajowski prennent donc position dans la région, tout en déclarant qu'elles « n’intervenaient pas contre l’armée ni le peuple ukrainien ni ses représentants dont les propriétés, la sécurité, les institutions et leur fonctionnement seraient respectées<ref>Philippe Henri Blasen in : ''Analele Bucovinei'', 1/2014</ref> ».

Au [[Traité de Saint-Germain-en-Laye (1919)|Traité de Saint-Germain-en-Laye de 1919]], la Bucovine est reconnue comme roumaine, ce que les Ukrainiens locaux acceptent faute de mieux, car cela leur évite la [[guerre civile russe]], la [[terreur rouge]], les réquisitions, la [[collectivisation]] et les [[Famine soviétique de 1921-1922|famines]] qui sévissent en [[République socialiste soviétique d'Ukraine|Ukraine soviétique]]. Dans l’entre-deux guerres, l’ambiance multiculturelle et tolérante de cette « Douce Bucovine » est mise à mal par la [[Grande Dépression|crise économique des années 1930]] qui réveille la rancœur des Roumains les plus pauvres, jadis marginalisés sous le régime autrichien, et dont certains adhèrent aux idées nationalistes de la « [[Garde de fer]] », fondée par [[Corneliu Zelea Codreanu|Kornelius Zielinski]], un jeune [[Noblesse polonaise|noble polonais]] de Bucovine devenu nationaliste roumain et ayant changé son nom en Corneliu Zelea Codreanu.

=== La Bucovine partagée ===
{{voir aussi|Gouvernorat de Bucovine}}
Au début de la [[Seconde Guerre mondiale]], le {{Date|28|juin|1940}}, la Bucovine est partagée en deux par le [[Pacte germano-soviétique|pacte Hitler-Staline]] : l’[[Armée rouge]], le [[NKVD]] au Nord, la [[Wehrmacht]] et l’armée roumaine d’[[Ion Antonescu|Antonescu, devenue fasciste]] au Sud, mettent définitivement fin à la « Douce Bucovine ». Au sud l’[[antisémitisme]] est attisé par les partisans de Codreanu, appelés « [[Garde de fer|légionnaires]] ». Au nord l’anti-roumanisme de certains membres d’autres communautés est exploité par les agents du [[NKVD]] [[Staline|stalinien]] : [[Délation|dénonciations]] et [[Déportation des peuples en URSS|déportations]] se succèdent. Au nord, devenu soviétique, les [[Allemands de Bucovine|Allemands]], bien que tous nés sur place, sont « rapatriés » de force vers le [[Troisième Reich]], placés dans des trains et des bus qui ne seront jamais rendus ; les Roumains, pour leur part, sont envoyés vers [[Goulag|l’Asie centrale et la Sibérie]] et parfois [[Massacre de Fântâna Albă|massacrés]] ; puis, [[Opération Barbarossa|à partir de 1941]], les [[Shoah en Roumanie|Juifs de toute la Bucovine sont déportés]] par l’armée roumaine vers la [[Transnistrie (région)|Transnistrie]] sous l’accusation d’avoir [[Judéo-bolchévisme|soutenu l’invasion soviétique]] ; les Ukrainiens qui ont évité de contrarier les différents maîtres du territoire sont relativement épargnés, sauf les prêtres [[Église grecque-catholique ukrainienne|gréco-catholiques]] que le NKVD [[Persécution des chrétiens en Union soviétique|extermine ou déporte]] comme « [[Lutte des classes|laquais du féodalisme]] » et « pourvoyeurs de l'[[opium du peuple]] »<ref>Nikolaï Théodorovitch Bougaï, {{ru}} ''Informations des rapports de Béria et de Krouglov à Staline'', éd. de l’Acad. de sciences de Moldavie nr. 1, Chișinău, 1991 (Н.Ф. Бугай, «Выселение произвести по распоряжению Берии…» in: «О депортации населения из Молдавской ССР в 40-50-е годы», Исторические науки в Молдавии, {{N°|1}}, Кишинев 1991, 1.0), ''Déportation des peuples de Biélorussie, Ukraine et Moldavie'', éd. Dittmar Dahlmann et Gerhard Hirschfeld, Essen, Allemagne, 1999, p. 567-581 («Депортация народов из Украины, Белоруссии и Молдавии: Лагеря, принудительный труд и депортация» Германия, Эссен 1999, 1.3), et « La question de la déportation des peuples d'URSS dans les années 1930 et 1940 » dans ''Revue d'histoire de l'URSS'' 1989 («К вопросу о депортаций народов СССРв 30-40ш годах», ИСССР 1989).</ref>.

==== La Bucovine soviétique : la Bucovine du Nord ====
En Bucovine du nord, centrée sur la capitale [[Tchernivtsi|Cernăuți]] et occupée par l’[[Armée rouge]], des paysans roumains et des [[Lipovènes]] russes sont [[Massacre de Fântâna Albă|massacrés à Fântâna Albă]] et l’ensemble des Roumains cultivés qui n’avaient pas pu fuir ([[instituteur]]s, [[pope]]s, professions libérales, [[fonctionnaire]]s) est déporté vers le [[Kazakhstan]] et la [[Sibérie]]<ref>Le 13 juin 1941, des unités du [[NKVD]] patrouillèrent dans les rues de Cernăuți à la recherche de « bourgeois », de « sionistes », d’« espions roumains » et d’« ennemis du pouvoir soviétique ». Ils arrêtèrent ainsi {{unité|3800|personnes}}, dont près de la moitié de Juifs. Les « coupables » furent déportés en Sibérie, mais restèrent d’abord trois jours à la gare dans des wagons fermés : [http://www.bucovine.com/fr/pages/villes/czernowitz.shtml].</ref>. Les [[Allemands de Bucovine]] sont transportés de force vers le [[Troisième Reich|Reich]] en quelques jours et installés en [[Posnanie]], dans le [[Wartheland]] (anciennement [[Pologne|polonais]]), où on leur attribue les fermes prises aux Polonais massacrés, et des immeubles dont on a chassé les Juifs. En 1944, ces Allemands bucoviniens se trouvent en première ligne devant l’avance de l’[[Armée rouge]] et [[Crimes de guerre de l'Armée rouge pendant la Seconde Guerre mondiale|subissent les conséquences d’une décision qu’ils n’avaient pas prise]].

La Bucovine du nord change de mains deux fois pendant la [[Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale)|Seconde Guerre mondiale]], en particulier en juin [[1941]] quand le général Petre Dumitrescu la reprend pour le compte de la Roumanie d’[[Ion Antonescu|Antonescu]] avec la troisième armée roumaine, et en mars [[1944]], quand l’[[Armée rouge]] reprend le territoire pour l’[[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]]. La population subit de lourdes violences mais la ville de Cernăuți-Tchernivtsi, bien que quasi-vidée de ses habitants, est épargnée par les bombardements et en sort presque intacte.

Sous le régime Antonescu, la majeure partie de la [[Juifs de Bucovine|communauté juive]] de Bucovine est anéantie par les déportations vers l’Ukraine, au-delà des fleuves [[Dniestr]] et [[Boug (rivière)|Boug]], dans la [[Podolie]] annexée par le régime Antonescu et rebaptisée [[Transnistrie (région)|Transnistrie]], où les Juifs de Bucovine meurent en masse de froid, de la [[dysenterie]] et du [[typhus]], avec les Juifs de [[Bessarabie]] et des [[Roms]]. Le « [[Oskar Schindler|Schindler]] local », [[Traian Popovici]], maire de [[Tchernivtsi|Cernăuți]], un « [[Juste parmi les nations|juste]] » totalement oublié hors d’[[Israël]], réussit à sauver {{unité|20000|Juifs}}, la moitié de la communauté de sa ville. Ces personnes deviennent soviétiques en 1944, et leurs descendants vivent aujourd’hui dans la diaspora. Pour mener à bien ses sauvetages, Traian Popovici a dû se justifier auprès d’Antonescu en usant d’arguments économiques {{Note|texte=Radu Ioanid, ''La Roumanie et la Shoah : Destruction et survie des Juifs et des Tsiganes sous le régime Antonescu, 1940-1944'', Paris, éditions de la Maison des sciences de l'Homme, 2002, {{p.|203}}.}} : ses lettres sont à présent utilisées dans des buts [[polémique]]s pour contester sa qualité de « juste » — dans le même ordre d’idées, Oskar Schindler, membre du parti nazi, a lui aussi usé d’arguments économiques<ref>{{Harvsp|texte=|David Crowe|2004|loc=|id=David_Crowe2004|p=46-47}}.</ref>.

==== Après la guerre ====
[[Fichier:Bucovina Romania Ukraine.png|vignette|La Bucovine (orange) en Ukraine et Roumanie.]]
À l’issue de la guerre, le partage de la Bucovine entre l’[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] et la Roumanie est reconnu par le [[Traité de Paris (1947)|traité de paix de Paris]] en [[1947]], bien que la Bucovine n’eût pas été revendiquée par Staline avant 1940, car elle n’avait pas, comme la [[Bessarabie]], fait partie de l’[[Empire russe]]. La Bucovine du nord, devenue l’[[oblast de Tchernivtsi]], fait partie de la [[République socialiste soviétique d'Ukraine]], tandis que le sud de la province, formant le département ([[Județ]]) de [[Județ de Suceava|Suceava]] en 1968, fait partie de la [[Régime communiste de Roumanie|Roumanie communiste]] : cette division de la région est restée en place jusqu’à nos jours, entre les États modernes d’[[Ukraine]] et de [[Roumanie]]. Selon la correspondance entre le ministre Krouglov et Staline, citée par Nikolai Bugai, environ {{unité|60000|Roumains}} ont été déportés hors de Bucovine de juillet 1940 à juin 1941 et {{unité|253000|Roumains}} entre 1944 et 1955{{Note|texte=Nikolaï F. Bugaï, ''Les Déportation des peuples d'Ukraine, de Biélorussie et Moldavie'', Essen, Hg. v. Dittmar Dahlmann et [[Gerhard Hirschfeld]], 1999, {{p.|567–581}}.}}. La [[Résistance anticommuniste roumaine|lutte de maquisards roumains]] contre les Soviétiques dura toutefois jusqu'en 1958{{Note|texte=[https://www.scribd.com/doc/5018467/Resistance-paysanne-et-maquis-en-Roumanie-de-1945-a-1965 Résistance paysanne et maquis en Roumanie de 1945 à 1965, Georges Diener] : Les maquis organisés contre l’administration communiste instaurée par les soviétiques le 6 mars 1945 trouvèrent ainsi en Bucovine un terrain psychologique et géographique favorable car les populations s’étaient déjà plus ou moins habituées à ces hommes armés qui avaient investi les montagnes où ils trouvaient refuge sous d’épaisses toisons de sapins. Les maquisards, qui agirent dans la clandestinité de juillet 1945 à janvier 1958, étaient pourtant différents des partisans antisoviétiques par leur appartenance sociale, leurs mobiles, leurs actions mais surtout leur statut, puisque les premiers s’assimilaient à des soldats combattant aux ordres de leur armée, alors que les seconds étaient des maquisards en situation des plus irrégulières, agissant dans la plus totale clandestinité.}}. Les survivants ont été divisés arbitrairement en deux communautés par l’administration soviétique : ceux vivant à l’est de Tchernivtsi ont été classés « [[Moldaves]] » (et il leur était impossible de quitter l’URSS), les autres ont été classés « Roumains » et avaient le droit de demander à émigrer en Roumanie. Après la [[dislocation de l'URSS]], un monument a été érigé à la mémoire des victimes{{Note|texte=[http://www.fonjallaz.net/Ukraine-Grand-Famine/Bykivnia/memorial-web-bykivnia/index.html Combien d'hommes, de femmes et d'adolescents…]}}.
[[Image:Tchernivtsi oblast 2001.png|thumb|Groupes ethniques de l'[[oblast de Tchernivtsi]] en 2001 : [[Ukrainien|ukrainophones]] en bleu, [[Roumains et roumanophones|roumanophones]] en vert, [[polonais]] en jaune et [[lipovènes]] en rouge.]]

Depuis l’[[Occupation soviétique de la Bessarabie et de la Bucovine du Nord|occupation de la Bucovine du nord]], la politique soviétique d’épuration ethnique vise, comme dans d’autres régions récemment annexées ([[Bessarabie]], ouest de l’[[Ukraine]], [[Pays baltes]]), à déporter les autochtones et à les remplacer par des [[Diaspora russe|colons russes]] et [[ukrainiens]], ces derniers venus de l'Est ukrainien et souvent [[Russe|russophones]]. Les populations [[Roumain|roumanophones]] sont de plus en plus minoritaires. Selon le recensement officiel de 2001, leur nombre étant aujourd’hui de seulement {{unité|173000|personnes}} sur {{unité|908500|habitants}}.

Une minorité [[Roumains|roumaine]] compacte habite encore le sud de l'[[oblast de Tchernivtsi]] : dans quatre [[raion]]s, elle représente une proportion significative selon le recensement de 2001 :
* [[Hertsa]] (Herța) : 95 %
* [[Novosselytsia]] (Sulița Nouă) : 61 %
* [[Hlyboka]] (Adâncata) : 50 %
* [[Storojynets]] (Strășineț) : 30 %

== Personnalités remarquables ==
La Bucovine a donné de nombreux personnages aux cultures de la Roumanie, de l’Autriche et de l’Ukraine, mais à l'international, ce sont deux écrivains et poètes de langue allemande, [[Paul Celan]] (1920-1970) et [[Gregor von Rezzori]] (Răzoare, 1914-1998) qui sont les plus connus. Ce dernier, citoyen autrichien presque toute sa vie, exprimait le point de vue des [[Habsbourg]] sur sa Bucovine natale, selon lequel c’était {{Citation|une ancienne province turque}} et {{Citation|une terre de personne}} (''[[terra nullius]]''), tandis que les siècles et les héritages de son passé moldave sont passés sous silence. D’autres ouvrages décrivent la période austro-hongroise comme un temps idyllique, ignorant la dure condition des autochtones moldaves à l’époque, qui, de ce fait, y apparaissent comme des brutes inexplicablement [[Xénophobie|xénophobes]]<ref>Florence Heymann, ''Le Crépuscule des lieux'', Stock 2003, Prix « Wizo » 2004.</ref>.

L’écrivain israélien [[Aharon Appelfeld]] (1932-2018), né dans un village proche de [[Tchernivtsi|Czernowitz]] en 1932, décrit l’important apport culturel des [[Histoire des Juifs en Bucovine|Juifs de Bucovine]], où ils furent vecteurs d’échanges d’idées et d’introduction d’innovations technologiques<ref>[https://www.courrierinternational.com/article/2008/06/19/czernowitz-la-jerusalem-de-bucovine ''Courrier International''] le 18 juin 2008.</ref>. La poétesse [[Rose Ausländer]] (1901-1988), le musicien [[Histoire des Juifs en République tchèque|tchécoslovaque]] [[Dol Dauber]] (1894-1950), le médecin et écrivain [[Histoire des Juifs en Roumanie|roumain]] [[Robert Flinker]] (1906-1945), l’écrivain et poète [[Alfred Gong]] (1920-1981), le poète [[Alfred Kittner]] (1906-1991), le médecin pionnier de l’anesthésie-réanimation en France [[Ernest Kern]] (1908-1969), le poète [[Itsik Manguer|Itzik Manger]] (1901-1969) ou le [[réalisateur]] [[Histoire des Juifs aux États-Unis|américain]] [[Otto Preminger]] (1906-1986) sont issus de cette communauté qui eut aussi son « [[Anne Frank]] » ou « [[Éva Heyman]] » : la jeune martyre [[Selma Meerbaum-Eisinger]] (1924-42).

En outre, la Bucovine donna à la culture roumaine l’écrivain et historien Zamfir Ralli-Arbore (1848-1933) et l’actrice [[Maria Forescu]] (1875-1943), à l’Autriche l’économiste [[Joseph Schumpeter]] (1883-1950), à l’[[République de Weimar|Allemagne]] et l’[[Angleterre]] le metteur en scène [[Friedrich Zelnik]] (1895-1950) et à la politique ukrainienne le premier ministre [[Arseni Iatseniouk]] (né en 1974).

== Localités ==
=== Bucovine du Nord (ukrainien / roumain) ===
* [[Berehomet]] (Berhomet pe Siret)
* [[Tchernivtsi]] (Cernăuți)
* [[Hlyboka]] (Adâncata)
* [[Kitsman]] (Coțmani)
* [[Krasnoïlsk]] (Crasna-Ilschei)
* [[Bila Krynytsya]] (Fântâna Albă) 
* [[Lopuchna]] (Lăpușna)
* [[Lukawzi]] (Lucavăț pe Siret)
* [[Loujany]] (Lujani)
* [[Nepolokivtsi]] (Nipolcăuți)
* [[Poutyla]] (Putila)
* [[Sadagóra]] (Sadagura)
* [[Stanestya]] (Stănești)
* [[Storojynets]] (Strășineț, Storojineț)
* [[Dolischnij Chepit]] (Șipotele Siretului)
* [[Vachkivtsi]] (Vășcăuți)
* [[Vyjnytsia]] (Vijnița)
* [[Zastavna]] (Zastavna)

=== Bucovine du Sud (roumain / polonais-allemand) ===
* [[Câmpulung Moldovenesc]] (Kimpolung)
* [[Gura Humorului]] (Hómor)
* [[Radauti|Rădăuți]] (Radowitz)
* [[Siret (Roumanie)|Siret]] (Sereth)
* [[Solca]] (Solka)
* [[Suceava]] (Suczawa)
* [[Vatra Dornei]] (Dornawatra)

== Notes et références ==
{{Références}}

== Voir aussi ==
{{Autres projets|commons=Category:Bukovina|wiktionary=Bucovine}}
* [[Via Transilvanica]]

=== Liens externes ===
{{Liens}}
* [http://www.bukovinasociety.org/ Bukovina Society of the Americas]
* [http://www.cacica.eu Polish minority in Cacica]
* [http://www.cacica.eu/foto Cacica, Bucovina Romania], galerie de photos
* [http://www.geschichtswerkstatt-europa.org/expired-project-details/items/czernivitsi.html Mémoire multiculturelle et pérennité des traces: un projet de la Geschichtswerkstatt Europa sur les couches de la mémoire à Tchernivtsi]

{{Palette|Régions historiques de Roumanie}}
{{Portail|Roumanie|Ukraine|XVIIIe siècle|XIXe siècle|XXe siècle}}

[[Catégorie:Bucovine|*]]