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« Art mosan » : différence entre les versions

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[[Image:Eglise-liege-stbarthelemy-janvier2006.jpg|thumb|[[Collégiale Saint-Barthélemy de Liège]]]]
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[[Fichier:Stavelot.Triptych.jpg|thumb|right|[[Triptyque de Stavelot]], Morgan Library, [[New York]]]]
[[Fichier:Stavelot.Triptych.jpg|thumb|right|[[Triptyque de Stavelot]], Morgan Library, [[New York]]]]

L’'''art mosan''' est un [[art roman]] d'influence [[art carolingien|carolingienne]], [[art ottonien|ottonienne]] et [[art byzantin|byzantine]] de la vallée de la [[Meuse (fleuve)|Meuse]], actif du {{sp|XI|e|au|XIII|e|s}}. La région mosane correspond aux frontières de l'[[Diocèse de Liège|ancien diocèse de Liège]] qui s'étendait principalement dans le territoire de l'actuelle [[Belgique]], mais également sur une partie de la [[France]], des [[Pays-Bas]] et de l'[[Allemagne]].
L’'''art mosan''' est un [[art roman]] d'influence [[art carolingien|carolingienne]] et [[art ottonien|ottonienne]] de la vallée de la [[Meuse (fleuve)|Meuse]], actif du {{sp|XI|au|XIII}}. La région mosane correspond aux frontières de l'[[Diocèse de Liège|ancien diocèse de Liège]] qui s'étendait principalement dans le territoire de l'actuelle [[Belgique]], mais également sur une partie de la [[France]], des [[Pays-Bas]] et de l'[[Allemagne]].


== Contexte historique ==
== Contexte historique ==
{{Article détaillé|Renaissance ottonienne|diocèse de Liège|principauté de Liège|Reichskirchensystem}}
{{Article détaillé|Renaissance ottonienne|diocèse de Liège|principauté de Liège|Reichskirchensystem}}
[[Fichier:Holy Roman Empire 1000 map-fr.svg|thumb|L'Empire vers l'an mil]]
[[Fichier:Holy Roman Empire 1000 map-fr.svg|thumb|L'Empire vers l'an mil]]
En [[843]], le traité de Verdun divise l'[[empire carolingien]] en trois royaumes dirigés par les petits-fils de [[Charlemagne]]. [[Louis II de Germanie|Louis le Germanique]] reçoit la Francie orientale qui correspond au territoire de la [[Germanie]]. Enjeu de luttes entre les royaumes de [[Francie occidentale]] et de [[Francie orientale]], la Lotharingie est rattachée au Saint-Empire en [[925]] et devient un [[duché]] au début du {{Xe siècle}}. En 923, [[Henri Ier de Germanie]] traverse le Rhin et s'empare de la Lotharingie. En 925, les Lotharingiens l'élisent comme roi, grâce à l'appui de [[Gislebert de Lotharingie|Gislebert]]. La vallée de l'Escaut fixe définitivement la frontière entre France et Germanie. Le couronnement d'Otton {{I}}{{er}} comme empereur le 2 février 962{{sfn|Rapp|2003|p=56}} est retenu comme la date de fondation du Saint-Empire romain. Le Saint-Empire obtient une légitimation temporelle, mais aussi sacrée en tant que nouvel {{lang|la|''Imperium Romanum''}}. L'art ottonien participe à une [[Renaissance ottonienne|renaissance]] et la volonté des empereurs de la nouvelle [[Ottoniens|dynastie ottonienne]] de restaurer le [[Saint-Empire romain germanique]]. Elle s'étend de la [[Mer du Nord]] et de la [[Mer Baltique|Baltique]] aux régions alpines et de la [[Saône]] au-delà de l'[[Elbe (fleuve)|Elbe]] et de [[Magdebourg]]. L'influence byzantine est également incontestable sur l'[[art ottonien]], à travers des manuscrits et des objets de luxe (tissus, ivoires) exécutés pour l'empereur et les grands<ref>{{Harvsp|texte=Riché, ''Les Carolingiens''|p=383-384|id=richca}}</ref>. En [[980]], l'empereur germanique [[Otton II du Saint-Empire|Otton II]] accorde des pouvoirs séculiers à l'évêque [[Notger de Liège|Notger]] qui devient le premier [[Prince-évêque de Liège|prince-évêque]]. Ce domaine va progressivement s'accroître, s'émanciper de l’Empire et devenir un État indépendant, la [[Principauté de Liège]], État qui ne recouvrira jamais, en son maximum d’extension, qu’un tiers environ du diocèse. Au {{s-|X|e}}, Liège, surnommée l'Athènes du Nord, devient la capitale d'une puissante [[Principauté de Liège|principauté épiscopale]], grâce à l'action des évêques [[Éracle]], Notger et [[Wazon]]. La ville devient un des principaux centres intellectuels d'Europe occidentale. Ses écoles sont célèbres jusqu'au {{s-|XII|e}}, de nombreux étudiants brillants, originaires de diverses contrées, y sont formés<ref>^[http://mrw.wallonie.be/sg/dsg/dircom/walcartes/pages/map105.htm Rayonnement international]</ref>. Sept [[collégiale]]s s'élèvent alors dans la ville, en plus de la [[Cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert de Liège|cathédrale]], où est enterré [[Lambert de Maastricht|saint Lambert]]. Deux [[abbaye]]s bénédictines s'y ajoutent : [[Abbaye des Bénédictins de Saint-Jacques de Liège|Saint-Jacques]] et [[Abbaye Saint-Laurent de Liège|Saint-Laurent]]. Tous ces bâtiments religieux forment comme une couronne d'églises autour de la cathédrale, épicentre religieux et politique du [[diocèse de Liège|diocèse]], cœur de la cité de saint Lambert. En [[1096]], départ en croisade de [[Godefroid de Bouillon]], duc de [[Basse Lotharingie]]. Du {{sp|XI|e|au|XIII|e|s}}, épanouissement de l’Art mosan, [[art roman]] d'influence [[art carolingien|carolingienne]] et [[art ottonien|ottonienne]], dans l'[[Diocèse de Liège|ancien diocèse de Liège]] qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne<ref>''L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}}'', collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), [[Éditions du Perron]], Liège, 2007, {{ISBN|978-2-87114-217-1}}.</ref>. Développement des [[abbayes mosanes]] : [[Abbaye Saint-Laurent de Liège|Saint-Laurent de Liège]], [[Abbaye de Stavelot|Stavelot]], [[Abbaye de Nivelles|Nivelles]], [[Abbaye d'Aulne|Aulne]], [[Abbaye de Floreffe|Floreffe]], [[Abbaye de Florennes|Florennes]], [[Abbaye de Flône|Flône]], [[Celles (Namur)|Celles]], [[Abbaye de Gembloux|Gembloux]] et [[Abbaye de Lobbes|Lobbes]]. Individualisation de la '''[[wallon|langue wallonne]]''' dans la partie romane du '''[[diocèse de Liège]]'''.
En [[843]], le [[traité de Verdun]] divise l'[[empire carolingien]] en trois royaumes dirigés par les petits-fils de [[Charlemagne]]. Enjeu de luttes entre les royaumes de [[Francie occidentale]] et de [[Francie orientale]], la Lotharingie est rattachée au Saint-Empire en [[925]] et devient un [[duché]] au début du {{Xe siècle}}. En 923, [[Henri Ier de Germanie]] traverse le Rhin et s'empare de la Lotharingie. En 925, les Lotharingiens l'élisent comme roi, grâce à l'appui de [[Gislebert de Lotharingie|Gislebert]]. La vallée de l'Escaut fixe définitivement la frontière entre France et Germanie. Le couronnement d'Otton {{I}}{{er}} comme empereur le 2 février 962{{sfn|Rapp|2003|p=56}} est retenu comme la date de fondation du Saint-Empire romain. Le Saint-Empire obtient une légitimation temporelle, mais aussi sacrée en tant que nouvel {{lang|la|''Imperium Romanum''}}. L'art ottonien participe à une [[Renaissance ottonienne|renaissance]] et la volonté des empereurs de la nouvelle [[Ottoniens|dynastie ottonienne]] de restaurer le [[Saint-Empire romain germanique]]. Elle s'étend de la [[Mer du Nord]] et de la [[Mer Baltique|Baltique]] aux régions alpines et de la [[Saône]] au-delà de l'[[Elbe (fleuve)|Elbe]] et de [[Magdebourg]]. En [[980]], l'empereur germanique [[Otton II du Saint-Empire|Otton II]] accorde des pouvoirs séculiers à l'évêque [[Notger de Liège|Notger]] qui devient le premier [[Prince-évêque de Liège|prince-évêque]]. Ce domaine va progressivement s'accroître, s'émanciper de l’Empire et devenir un État indépendant, la [[Principauté de Liège]], État qui ne recouvrira jamais, en son maximum d’extension, qu’un tiers environ du diocèse. Au {{s-|X|e}}, Liège, surnommée l'Athènes du Nord, devient la capitale d'une puissante [[Principauté de Liège|principauté épiscopale]], grâce à l'action des évêques [[Éracle]], Notger et [[Wazon]]. La ville devient un des principaux centres intellectuels d'Europe occidentale. Ses écoles sont célèbres jusqu'au {{s-|XII|e}}, de nombreux étudiants brillants, originaires de diverses contrées, y sont formés<ref>^[http://mrw.wallonie.be/sg/dsg/dircom/walcartes/pages/map105.htm Rayonnement international]</ref>. Sept [[collégiale]]s s'élèvent alors dans la ville, en plus de la [[Cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert de Liège|cathédrale]], où est enterré [[Lambert de Maastricht|saint Lambert]]. Deux [[abbaye]]s bénédictines s'y ajoutent : [[Abbaye des Bénédictins de Saint-Jacques de Liège|Saint-Jacques]] et [[Abbaye Saint-Laurent de Liège|Saint-Laurent]]. Tous ces bâtiments religieux forment comme une couronne d'églises autour de la cathédrale, épicentre religieux et politique du [[diocèse de Liège|diocèse]], cœur de la cité de saint Lambert. En [[1096]], départ en croisade de [[Godefroid de Bouillon]], duc de [[Basse Lotharingie]]. Du {{sp|XI|au|XIII}}, épanouissement de l’Art mosan, [[art roman]] d'influence [[art carolingien|carolingienne]] et [[art ottonien|ottonienne]], dans l'[[Diocèse de Liège|ancien diocèse de Liège]] qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne<ref>''L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}}'', collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), [[Éditions du Perron]], Liège, 2007, {{ISBN|978-2-87114-217-1}}.</ref>. Développement des [[abbayes mosanes]] : [[Abbaye Saint-Laurent de Liège|Saint-Laurent de Liège]], [[Abbaye de Stavelot|Stavelot]], [[Abbaye de Nivelles|Nivelles]], [[Abbaye d'Aulne|Aulne]], [[Abbaye de Floreffe|Floreffe]], [[Abbaye de Florennes|Florennes]], [[Abbaye de Flône|Flône]], [[Celles (Namur)|Celles]], [[Abbaye de Gembloux|Gembloux]] et [[Abbaye de Lobbes|Lobbes]]. Individualisation de la '''[[wallon|langue wallonne]]''' dans la partie romane du '''[[diocèse de Liège]]'''.


== Développement et aire géographique ==
== Développement et aire géographique ==
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La vallée de la [[Meuse (fleuve)|Meuse]] réside dans le cœur de l'[[Empire carolingien]] et donc le style mosan s'inspire largement de la tradition de l'[[art carolingien]]. Ainsi, il contient des éléments classiques forts, qui le sépare de l'[[art roman]] international, vu ailleurs au cours de la période, par exemple en [[France]], en [[Allemagne]], en [[Angleterre]] et en [[Italie]]. Toutefois, il partage certains éléments de l'art roman, tels que le traitement de l'espace. Bien que l'iconographie mosane du {{s2|XI|e|XII|e}} s'inspire largement de thèmes bibliques, certains chapiteaux richement sculptés dans les deux principales églises de [[Maastricht]] représentent des scènes de la vie quotidienne<ref name="am">{{Ouvrage |auteur1=Benoît Van den Bossche |directeur1=oui |titre=L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}} |lieu=Liège |éditeur=[[Éditions du Perron]] |année=2007 |isbn=}}</ref>.
La vallée de la [[Meuse (fleuve)|Meuse]] réside dans le cœur de l'[[Empire carolingien]] et donc le style mosan s'inspire largement de la tradition de l'[[art carolingien]]. Ainsi, il contient des éléments classiques forts, qui le sépare de l'[[art roman]] international, vu ailleurs au cours de la période, par exemple en [[France]], en [[Allemagne]], en [[Angleterre]] et en [[Italie]]. Toutefois, il partage certains éléments de l'art roman, tels que le traitement de l'espace. Bien que l'iconographie mosane du {{s2|XI|e|XII|e}} s'inspire largement de thèmes bibliques, certains chapiteaux richement sculptés dans les deux principales églises de [[Maastricht]] représentent des scènes de la vie quotidienne<ref name="am">{{Ouvrage |auteur1=Benoît Van den Bossche |directeur1=oui |titre=L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}} |lieu=Liège |éditeur=[[Éditions du Perron]] |année=2007 |isbn=}}</ref>.


La région mosane a été formée en grande partie par les limites de l'[[évêché de Liège]], qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne. Les principaux centres artistiques de la région ont été les villes de [[Liège]], [[Huy]], [[Dinant]], [[Namur]], [[Tongres]], [[Maastricht]], [[Roermond]] et [[Aix-la-Chapelle]], ainsi qu'un certain nombre de [[Abbayes mosanes|monastères]] importants : [[Abbaye de Saint-Trond |Saint-Trond]], [[Abbaye d'Aldeneik|Aldeneik]], [[Abbaye de Herkenrode|Herkenrode]], [[Abbaye d'Averbode|Averbode]], [[Abbaye de Munsterbilzen|Munsterbilzen]], [[Susteren]], [[Basilique de Sint-Odiliënberg|Sint-Odiliënberg]], [[Abbaye de Rolduc|Rolduc]], [[Abbaye de Burtscheid|Burtscheid]], [[Abbaye de Kornelimünster|Kornelimünster]], [[Abbaye de Stavelot|Stavelot]], [[Abbaye de Nivelles|Nivelles]], [[Abbaye d'Aulne|Aulne]], [[Abbaye de Floreffe|Floreffe]], [[Abbaye de Flône|Flône]], [[Celles (Namur)|Celles]], [[Abbaye de Gembloux|Gembloux]], [[Abbaye de Florennes|Florennes]], et [[Abbaye de Lobbes|Lobbes]]. À son apogée, l'art mosan a eu une forte influence sur les régions limitrophes, notamment en [[Rhénanie]] ([[Cologne]], [[Bonn]])<ref name="am" />.
La région mosane a été formée en grande partie par les limites de l'[[évêché de Liège]], qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne. Les principaux centres artistiques de la région ont été les villes de [[Liège]], [[Huy]], [[Dinant]], [[Namur]], [[Tongres]], [[Maastricht]], [[Roermond]] et [[Aix-la-Chapelle]], ainsi qu'un certain nombre de [[Abbayes mosanes|monastères]] importants : [[Abbaye de Saint-Trond |Saint-Trond]], [[Abbaye d'Aldeneik|Aldeneik]], [[Abbaye de Herkenrode|Herkenrode]], [[Abbaye d'Averbode|Averbode]], [[Abbaye de Munsterbilzen|Munsterbilzen]], [[Susteren]], [[Basilique de Sint-Odiliënberg|Sint-Odiliënberg]], [[Abbaye de Rolduc|Rolduc]], [[Abbaye de Burtscheid|Burtscheid]], [[Abbaye de Kornelimünster|Kornelimünster]], [[Abbaye de Stavelot|Stavelot]], [[Abbaye de Nivelles|Nivelles]], [[Abbaye d'Aulne|Aulne]], [[Abbaye de Floreffe|Floreffe]], [[Abbaye de Flône|Flône]], [[Celles (Namur)|Celles]], [[Abbaye de Gembloux|Gembloux]], [[Abbaye de Florennes|Florennes]], et [[Abbaye de Lobbes|Lobbes]]. À son apogée, l'art mosan a eu une forte influence sur les régions limitrophes, notamment en [[Rhénanie]] ([[Cologne]], [[Bonn]]), jusque Tournai et l'Autriche<ref name="am" />.


== Historiographie ==
== Historiographie ==

Le chanoine [[Raymond Lemaire (1878-1954)|Lemaire]] est le premier à définir deux écoles - une scaldienne et une mosane - d'art roman en Belgique, en 1906<ref>André Courtens et Jean Roubier, ''Belgique romane : architecture, art monumental'', Bruxelles, M. Vokaer, 1969, {{p.|25}}</ref>.
Le chanoine [[Raymond Lemaire (1878-1954)|Lemaire]] est le premier à définir deux écoles - une scaldienne et une mosane - d'art roman en Belgique, en 1906<ref>André Courtens et Jean Roubier, ''Belgique romane : architecture, art monumental'', Bruxelles, M. Vokaer, 1969, {{p.|25}}</ref>.


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Selon Albert Lemeunier, ancien conservateur du [[Musée d'Art religieux et d'Art mosan (Liège)|musée d'art religieux et d'Art mosan]], cet art essentiellement religieux « témoigne de l'apport essentiellement wallon à l'art et à la spiritualité non seulement de la Wallonie, mais aussi du monde occidental. Il tient son universalité de ce qu'il fut capable de donner autant que de recevoir »<ref>Albert Lemeunier, ''L'Art mosan, reflet de la pensée chrétienne en Wallonie'', tome II, {{p.|45-67}}</ref>.
Selon Albert Lemeunier, ancien conservateur du [[Musée d'Art religieux et d'Art mosan (Liège)|musée d'art religieux et d'Art mosan]], cet art essentiellement religieux « témoigne de l'apport essentiellement wallon à l'art et à la spiritualité non seulement de la Wallonie, mais aussi du monde occidental. Il tient son universalité de ce qu'il fut capable de donner autant que de recevoir »<ref>Albert Lemeunier, ''L'Art mosan, reflet de la pensée chrétienne en Wallonie'', tome II, {{p.|45-67}}</ref>.


Selon Philippe George, conservateur du [[trésor de la cathédrale de Liège]], « La [[Meuse (fleuve)|Meuse]] et tous ses affluents irriguent une région dont la culture et la religion font l'unité et l'identité : le pays mosan. À l'ouest et au sud, le diocèse de Liège ne recouvre pas toute la Wallonie, mais il la dépasse très largement vers le nord »<ref>Philippe George, « Les arts au Moyen Âge », dans ''Histoire de la Wallonie de la préhistoire au {{s-|XXI|e}}'' (sous la direction de Bruno Demoulin et Jean-Louis Kupper), Privat Toulouse, 2004, {{p.|126-163}}</ref>.
Selon Philippe George, conservateur du [[trésor de la cathédrale de Liège]], « La [[Meuse (fleuve)|Meuse]] et tous ses affluents irriguent une région dont la culture et la religion font l'unité et l'identité : le [[pays mosan]]. À l'ouest et au sud, le diocèse de Liège ne recouvre pas toute la Wallonie, mais il la dépasse très largement vers le nord »<ref>Philippe George, « Les arts au Moyen Âge », dans ''Histoire de la Wallonie de la préhistoire au {{s-|XXI|e}}'' (sous la direction de Bruno Demoulin et Jean-Louis Kupper), Privat Toulouse, 2004, {{p.|126-163}}</ref>.


== Architecture mosane ==
== Architecture mosane ==
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===Les basiliques à transept bas===
===Les basiliques à transept bas===

L'école mosane dont certains caractères l'unisse à la région de Cologne, s'affirme dans le premier quart du {{s-|XI}} en Wallonie, dans l'ancien diocèse de Liège, en remontant la Meuse parfois jusqu'en Lorraine. Les exemples proches de l'an mil, presque définitifs sont repris dans la période romane. Elle est caractérisée par des édifices bas avec des chœurs triples, des absidioles attenantes à l'abside principale, la [[nef]] est massive, avec des piliers rectangulaires. La façade Ouest est mise en valeur par un clocher unique et un décor mural de grandes arcades aveugles. Nivelle en est la plus belle expression. Les édifices à transept bas participent au renouvellement des formes pré-romanes. La nef se poursuit indivise jusqu'à l'entrée de l'abside, les deux croisillons sont séparés d'elle par des murs avec des ouvertures plus ou moins larges. Les deux bras du transept sont plus bas et souvent plus étroits que la nef principale. Il n'y a pas de croisée du transept par l'absence d'arcs d'encadrement Est et Ouest. Dans la composition spatiale de la nef, l'architecture ottonienne ignore la travée. Les murailles des églises autour de l'an mil sont inarticulées et les grandes arcades découpées à l'emporte-pièce dans des parois unies. Elles peuvent être groupées avec une certaine variété grâce aux supports alternés mais souvent les tribunes au-dessus des arcades n'en reprennent pas le rythme.
L'école mosane dont certains caractères l'unisse à la région de Cologne, s'affirme dans le premier quart du {{s-|XI}} en Wallonie, dans l'ancien diocèse de Liège, en remontant la Meuse parfois jusqu'en Lorraine. Les exemples proches de l'an mil, presque définitifs sont repris dans la période romane. Elle est caractérisée par des édifices bas avec des chœurs triples, des absidioles attenantes à l'abside principale, la [[nef]] est massive, avec des piliers rectangulaires. La façade Ouest est mise en valeur par un clocher unique et un décor mural de grandes arcades aveugles. Nivelle en est la plus belle expression. Les édifices à transept bas participent au renouvellement des formes pré-romanes. La nef se poursuit indivise jusqu'à l'entrée de l'abside, les deux croisillons sont séparés d'elle par des murs avec des ouvertures plus ou moins larges. Les deux bras du transept sont plus bas et souvent plus étroits que la nef principale. Il n'y a pas de croisée du transept par l'absence d'arcs d'encadrement Est et Ouest. Dans la composition spatiale de la nef, l'architecture ottonienne ignore la travée. Les murailles des églises autour de l'an mil sont inarticulées et les grandes arcades découpées à l'emporte-pièce dans des parois unies. Elles peuvent être groupées avec une certaine variété grâce aux supports alternés mais souvent les tribunes au-dessus des arcades n'en reprennent pas le rythme.


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Hildesheim-St Michaels Church.interior.01.JPG|thumb|left|L'[[Église Saint-Michel de Hildesheim]] de style ottonien a probablement servi de modèle.
Hildesheim-St Michaels Church.interior.01.JPG|L'[[Église Saint-Michel de Hildesheim]] de style ottonien a probablement servi de modèle.
ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07861.jpg|Arcs et piliers cruciformes, [[Collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]]
ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07861.jpg|Arcs et piliers cruciformes, [[Collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]]
Hastière-par-delà EA1cJPG.jpg|Hastière-par-delà
Hastière-par-delà EA1cJPG.jpg|Hastière-par-delà
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20120518 xhignesse07.JPG|Xhignesse
20120518 xhignesse07.JPG|Xhignesse
Lobbes Collégiale R07.jpg|Lobbes
Lobbes Collégiale R07.jpg|Lobbes
File:Waha B PM 035359.jpg|Waha
ID83034-CLT-0002-01-Waha Eglise Saint-Etienne-PM 35359.jpg|Waha
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===Le massif occidental===
=== Le massif occidental ===
Ce refus de la travée entraîne une grande variété de supports. Les supports cruciformes n'apparaissent qu'à la jonction des arcs de la croisée du transept ou à la retombée des arcs diaphragmes qui partagent en deux la longueur de la nef comme à la [[Collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]]. Le [[massif occidental]] ottonien a pour origine le [[Massif occidental|westwerk]] carolingien à plan central qui est une plateforme élevée sur une crypte de plain-pied avec le sol de l'église et qui sert de passage vers l'Ouest. Le Westbau se trouvait principalement dans les monastères impériaux dans lesquels résidaient des rois ou des empereurs itinérants. Réservé à eux et à leur entourage, le Westbau sera surtout utilisé à des fins laïques jusqu'à la réforme clunisienne, par exemple en tant que chancellerie ou tribunal. D'une galerie s'ouvrant à l'église, le souverain pouvait prendre part au service depuis une position élevée. La structure traditionnelle de l'église avait deux significations : l'église proprement dite à l'est, réservée aux saints, et un ouvrage en forme de rempart, place du souverain en tant que protecteur de l'église. La signification symbolique du Westbau était celle d'une forteresse. Alors que l'est (lever du soleil) était la direction du Christ et de l'abside qui abritait l'autel, les pouvoirs du mal et de la mort étaient assignés à l'ouest (coucher du soleil) et n'étaient pas autorisés à accéder à l'église.

Ce refus de la travée entraine une grande variété de supports. Les supports cruciformes n'apparaissent qu'à la jonction des arcs de la croisée du transept ou à la retombée des arcs diaphragmes qui partagent en deux la longueur de la nef comme à la [[Collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]]. Le [[massif occidental]] ottonien a pour origine le [[Massif occidental|westwerk]] carolingien à plan central qui est une plateforme élevée sur une crypte de plain-pied avec le sol de l'église et qui sert de passage vers l'Ouest. Le Westbau se trouvait principalement dans les monastères impériaux dans lesquels résidaient des rois ou des empereurs itinérants. Réservé à eux et à leur entourage, le Westbau sera surtout utilisé à des fins laïques jusqu'à la réforme clunisienne, par exemple en tant que chancellerie ou tribunal. D'une galerie s'ouvrant à l'église, le souverain pouvait prendre part au service depuis une position élevée. La structure traditionnelle de l'église avait deux significations : l'église proprement dite à l'est, réservée aux saints, et un ouvrage en forme de rempart, place du souverain en tant que protecteur de l'église. La signification symbolique du Westbau était celle d'une forteresse. Alors que l'est (lever du soleil) était la direction du Christ et de l'abside qui abritait l'autel, les pouvoirs du mal et de la mort étaient assignés à l'ouest (coucher du soleil) et n'étaient pas autorisés à accéder à l'église.

===Zone diffusion===


=== Zone de diffusion ===
La zone de diffusion de l'art mosan qui compte des villes telles [[Maastricht]] et [[Aix-la-Chapelle]], subit l'influence de l'art carolingien dont elle est en quelque sorte le prolongement<ref>Belgique Luxembourg, ''Le Guide vert, Michelin'', 2008, {{p.|42}}.</ref>. La région la plus riche est celle de la [[Wallonie]] et des pays de la Meuse avec l'[[Celles (Namur)|abbatiale de Celles-les-Dinant]], le prieuré de [[Hastière-par-Delà]] de 1033-1035, la [[collégiale Saint-Denis de Liège]] dont il reste des murs des environs de l'an mil, [[Wessem]] près de [[Roermond]] aussi de l'an mil et [[Aubechies]]. Le chef-d'œuvre de cette architecture est la [[collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]] dont le massif occidental du {{s|XII}} remplace un autre chœur carolingien ou ottonien. On peut dater les débuts de construction vers l'an mil avec une consécration en 1046, le transept vers 1050 et le chœur oriental peu après. L'[[Abbaye Notre-Dame de Morienval|abatiale de Morienval]] dans son état du {{s-|XI}} peut aussi être rattachée à ce même courant architectural. {{Refnec|Parmi les principaux édifices religieux d'art mosan, on peut citer :}}
La zone de diffusion de l'art mosan qui compte des villes telles [[Maastricht]] et [[Aix-la-Chapelle]], subit l'influence de l'art carolingien dont elle est en quelque sorte le prolongement<ref>Belgique Luxembourg, ''Le Guide vert, Michelin'', 2008, {{p.|42}}.</ref>. La région la plus riche est celle de la [[Wallonie]] et des pays de la Meuse avec l'[[Celles (Namur)|abbatiale de Celles-les-Dinant]], le prieuré de [[Hastière-par-Delà]] de 1033-1035, la [[collégiale Saint-Denis de Liège]] dont il reste des murs des environs de l'an mil, [[Wessem]] près de [[Roermond]] aussi de l'an mil et [[Aubechies]]. Le chef-d'œuvre de cette architecture est la [[collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles]] dont le massif occidental du {{s|XII}} remplace un autre chœur carolingien ou ottonien. On peut dater les débuts de construction vers l'an mil avec une consécration en 1046, le transept vers 1050 et le chœur oriental peu après. L'[[Abbaye Notre-Dame de Morienval|abatiale de Morienval]] dans son état du {{s-|XI}} peut aussi être rattachée à ce même courant architectural. {{Refnec|Parmi les principaux édifices religieux d'art mosan, on peut citer :}}
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Fichier:Limburger Dom (Frontansicht 2).jpg|[[Cathédrale de Limburg|Cathédrale rhénane ottonienne de Limburg an der Lahn]]
Limburger Dom (Frontansicht 2).jpg|[[Cathédrale de Limburg|Cathédrale rhénane ottonienne de Limburg an der Lahn]]
Fichier:Saint Denis Liège.jpg|Façade occidentale de la [[collégiale Saint-Denis de Liège]]
Saint Denis Liège.jpg|Façade occidentale de la [[collégiale Saint-Denis de Liège]]
Fichier:00 Celles Houyet.JPG|[[Collégiale Saint-Hadelin de Celles]]
00 Celles Houyet.JPG|[[Collégiale Saint-Hadelin de Celles]]
Fichier:Belgium, Nijvel, Main Church.JPG|Façade occidentale de l'[[abbaye de Nivelles]]
Belgium, Nijvel, Main Church.JPG|Façade occidentale de l'[[abbaye de Nivelles]]
Fichier:Kerk aldeneik2.jpg|Façade occidentale de l'ancienne [[abbaye d'Aldeneik]]
Kerk aldeneik2.jpg|Façade occidentale de l'ancienne [[abbaye d'Aldeneik]]
Fichier:Amay Col 1c JPG.jpg|[[Collégiale Saint-Georges et Sainte-Ode d'Amay]]
Amay Col 1c JPG.jpg|[[Collégiale Saint-Georges et Sainte-Ode d'Amay]]
Fichier:Maastricht Sint-Servaasbasiliek BW 2017-08-19 15-56-11 s.jpg|Façade occidentale de la [[basilique Saint-Servais]], [[Maastricht]]
Maastricht Sint-Servaasbasiliek BW 2017-08-19 15-56-11 s.jpg|Façade occidentale de la [[basilique Saint-Servais]], [[Maastricht]]
Fichier:Apsis Onze Lieve Vrouwkerk Maastricht.jpg|Façade orientale de la [[Basilique Notre-Dame (Maastricht)|basilique Notre-Dame]], [[Maastricht]]
Apsis Onze Lieve Vrouwkerk Maastricht.jpg|Façade orientale de la [[Basilique Notre-Dame (Maastricht)|basilique Notre-Dame]], [[Maastricht]]
Fichier:Susteren, Limburg, basiliek crop.JPG|Façade occidentale de l'abbaye de [[Susteren]]
Susteren, Limburg, basiliek crop.JPG|Façade occidentale de l'abbaye de [[Susteren]]
Fichier:Rolduc04.jpg|Intérieur de l'[[abbaye de Rolduc]]
Rolduc04.jpg|Intérieur de l'[[abbaye de Rolduc]]
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== Les autres domaines de l'art mosan ==
== Les autres domaines de l'art mosan ==

=== Orfèvrerie ===
=== Orfèvrerie ===
{{Article détaillé|Dinanderie|Trésor d'Hugo d'Oignies|Châsse de Saint-Maur}}
À l’époque romane, le renouveau des [[sacrement]]s et le culte des reliques provoquent un essor de l’orfèvrerie religieuse. La [[dinanderie]] est pratiquée au début du XIe siècle dans la vallée de la Meuse, d'abord à Huy puis à Dinant (ville d'où cette discipline tire son nom). Elle est probablement à l'origine d'une importante tradition d'orfèvrerie liturgique qui se répand dans tout le pays mosan et produit des châsses, reliquaires, croix, reliures d'une grande richesse. Parmi les chefs-d'œuvre de l'art mosan en orfèvrerie, on peut citer le ''[[Triptyque de Stavelot]]'', la ''[[châsse de Notre-Dame]]'' de la cathédrale de [[Tournai]], le ''[[Trésor d'Hugo d'Oignies]]'' à [[Namur]], le ''chef-reliquaire du pape Alexandre'' des [[Musées royaux d'Art et d'Histoire]] de Bruxelles et la ''[[châsse de Saint-Maur]]'' visible en [[République tchèque]], ou encore les œuvres de [[Nicolas de Verdun]], comme la ''[[châsse des rois mages]]'', conservée à la cathédrale de [[Cologne]] et le célèbre [[retable]] conservé à [[Abbaye de Klosterneuburg|Vienne (Autriche)]]. Citons également la couronne-reliquaire dite ''Couronne de Liège'', offerte par le roi de France [[Louis IX de France|saint Louis]] au couvent des dominicains de Liège, ou encore le ''reliquaire du bras de Charlemagne'', réalisé à la demande de l'empereur [[Frédéric Barberousse]], qui sont exposés au Louvre. Ces œuvres sont caractérisées par une grande finesse révélant la haute maîtrise technique des [[Orfèvrerie|orfèvres]] mosans de l'époque<ref name="am" />.


À l’époque romane, le renouveau des [[sacrement]]s et le culte des reliques provoquent un essor de l’orfèvrerie religieuse. La [[dinanderie]] est pratiquée au début du XIe siècle dans la vallée de la Meuse, d'abord à Huy puis à Dinant (ville d'où cette discipline tire son nom). Elle est probablement à l'origine d'une importante tradition d'orfèvrerie liturgique qui se répand dans tout le pays mosan et produit des châsses, reliquaires, croix, reliures d'une grande richesse. Parmi les chefs-d'œuvre de l'art mosan en orfèvrerie, on peut citer le ''[[Triptyque de Stavelot]]'', la ''[[châsse de Notre-Dame]]'' de la cathédrale de [[Tournai]], le ''[[Trésor d'Hugo d'Oignies]]'' à [[Namur]], le ''chef-reliquaire du pape Alexandre'' des [[Musées royaux d'Art et d'Histoire]] de Bruxelles et la ''[[châsse de Saint-Maur]]'' visible en [[République tchèque]], ou encore les œuvres de [[Nicolas de Verdun]], comme la ''[[châsse des rois mages]]'', conservée à la cathédrale de [[Cologne]] et le célèbre retable conservé à [[Abbaye de Klosterneuburg|Vienne (Autriche)]]. Citons également la couronne-reliquaire dite ''Couronne de Liège'', offerte par le roi de France [[Louis IX de France|saint Louis]] au couvent des dominicains de Liège, ou encore le ''reliquaire du bras de Charlemagne'', réalisé à la demande de l'empereur [[Frédéric Barberousse]], qui sont exposés au Louvre. Ces œuvres sont caractérisées par une grande finesse révélant la haute maîtrise technique des [[Orfèvrerie|orfèvres]] mosans de l'époque<ref name="am" />.
{{Article détaillé|Dinanderie|Trésor d'Hugo d'Oignies|Châsse de Saint-Maur}}
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Louvre MosanReliquary.jpg|Reliquaire mosan, {{s-|XII|e}}, [[Musée du Louvre]], [[Paris]]
Louvre MosanReliquary.jpg|Reliquaire mosan, {{s-|XII|e}}, [[Musée du Louvre]], [[Paris]]
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Barbarossaleuchter.jpg|Chandelier de Frédéric {{Ier}} Barberousse, empereur romain germanique, [[cathédrale d'Aix-la-Chapelle]]
Barbarossaleuchter.jpg|Chandelier de Frédéric {{Ier}} Barberousse, empereur romain germanique, [[cathédrale d'Aix-la-Chapelle]]
MaastrichtNoodkist05.jpg|Reliquaire de St Servais, {{s-|XII|e}}, Basilique Saint-Servais, Maastricht
MaastrichtNoodkist05.jpg|Reliquaire de St Servais, {{s-|XII|e}}, Basilique Saint-Servais, Maastricht
Karlsschrein front side left.jpg|Reliquaire de Charlemagne, 1182-1215, [[cathédrale d'Aix-la-Chapelle]]
Karlsschrein front side left.jpg|Reliquaire de Charlemagne, 1182-1215, [[cathédrale d'Aix-la-Chapelle]]
Cologne Cathedral Shrine of Magi.jpg|[[Châsse des rois mages]], Atelier de [[Nicolas de Verdun]], 1181-1230, [[cathédrale de Cologne]]
Cologne Cathedral Shrine of Magi.jpg|[[Châsse des rois mages]], Atelier de [[Nicolas de Verdun]], 1181-1230, [[cathédrale de Cologne]]
Relikviář svatého Maura 2015.jpg|La [[Châsse de Saint-Maur]] est considérée comme le deuxième plus important artefact sur le territoire tchèque, après les Joyaux de la [[Couronne tchèque]]
Relikviář svatého Maura 2015.jpg|La [[Châsse de Saint-Maur]] est considérée comme le deuxième plus important artefact sur le territoire tchèque, après les Joyaux de la [[Couronne tchèque]]
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=== Champlevé ===
=== Champlevé ===

La technique du [[champlevé]] est particulièrement associée à l'art mosan. Cette technique de travail de l'émail s'est développée à la fin du {{s-|XI|e}}. Les émaux mosans sont, avec ceux de Limoges, les plus célèbres. Le travail pouvait également être réalisé sur l'or ou le vermeil<ref>* Osborne, Harold (ed), ''The Oxford Companion to the Decorative Arts'', 1975, OUP, {{ISBN|0-19-866113-4}}</ref>. Le '''[[Triptyque de Stavelot]]''' exposé à New York constitue une des plus belles œuvres mosanes. L''''Autel portatif de Stavelot''', visible dans la salle aux trésors des [[Musées royaux d'Art et d'Histoire]] de Bruxelles, constitue une autre œuvre remarquable.
{{Article détaillé|Champlevé mosan}}
{{Article détaillé|Champlevé mosan}}
La technique du [[champlevé]] est particulièrement associée à l'art mosan. Cette technique de travail de l'émail s'est développée à la fin du {{s-|XI|e}}. Les émaux mosans sont, avec ceux de Limoges, les plus célèbres. Le travail pouvait également être réalisé sur l'or ou le vermeil<ref>* Osborne, Harold (ed), ''The Oxford Companion to the Decorative Arts'', 1975, OUP, {{ISBN|0-19-866113-4}}</ref>. Le '''[[Triptyque de Stavelot]]''' exposé à New York constitue une des plus belles œuvres mosanes. L''''Autel portatif de Stavelot''', visible dans la salle aux trésors des [[Musées royaux d'Art et d'Histoire]] de Bruxelles, constitue une autre œuvre remarquable.


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Image:Armilla, rhein-maasgebiet, 1170-1180 ca.JPG|Armilla représentant la crucifixion, 1170-1180, [[Germanisches Nationalmuseum]], [[Nuremberg]]
Armilla, rhein-maasgebiet, 1170-1180 ca.JPG|Armilla représentant la crucifixion, 1170-1180, [[Germanisches Nationalmuseum]], [[Nuremberg]]
Image:Armlet Resurrection Louvre OA8261.jpg|Armilla représentant la résurrection du Christ, 1170-1180, [[Musée du Louvre]]
Armlet Resurrection Louvre OA8261.jpg|Armilla représentant la résurrection du Christ, 1170-1180, [[Musée du Louvre]]
Image:Enamel plaque Naaman BM.jpg|Guérison de Naaman dans le Jourdain, vers 1150, [[British Museum]]
Enamel plaque Naaman BM.jpg|Guérison de Naaman dans le Jourdain, vers 1150, [[British Museum]]
Image:Plaque centaur Louvre OA8097.jpg|Plaque représentant un centaure, émail champlevé sur cuivre doré, 1160–1170, [[Musée du Louvre]]
Plaque centaur Louvre OA8097.jpg|Plaque représentant un centaure, émail champlevé sur cuivre doré, 1160–1170, [[Musée du Louvre]]
Image:Mosan Workshop - Saint Peter - Walters 44101.jpg|Saint Pierre tenant les clés des royaumes du Ciel et de la Terre : émail champlevé, années 1160-1180, [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
Mosan Workshop - Saint Peter - Walters 44101.jpg|Saint Pierre tenant les clés des royaumes du Ciel et de la Terre : émail champlevé, années 1160-1180, [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
File:Mosan Workshop - Jacob Blessing Manasses and Ephraim - Walters 4497.jpg|Jacob bénissant Manassé et Ephraïm, Atelier de [[Godefroy de Huy]], [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
Mosan Workshop - Jacob Blessing Manasses and Ephraim - Walters 4497.jpg|Jacob bénissant Manassé et Ephraïm, Atelier de [[Godefroy de Huy]], [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
File:Cherub plaque Louvre MRR245.jpg|Chérubin et l'empereur byzantin Héraclius soumettant le roi sassanide Khosro II, plaque provenant d'une croix. 1160-1170, [[Musée du Louvre]]
Cherub plaque Louvre MRR245.jpg|Chérubin et l'empereur byzantin Héraclius soumettant le roi sassanide Khosro II, plaque provenant d'une croix. 1160-1170, [[Musée du Louvre]]
File:Pendant with the Virgin and Child, about 1160-1170 AD, Mosan, Circle of Godefroid de Huy, gilded copper and enamel - Cleveland Museum of Art - DSC08587.JPG| Collier avec la Vierge et l'Enfant, environ 1160-1170, Atelier de [[Godefroy de Huy]], [[Cleveland Museum of Art]].
Pendant with the Virgin and Child, about 1160-1170 AD, Mosan, Circle of Godefroid de Huy, gilded copper and enamel - Cleveland Museum of Art - DSC08587.JPG| Collier avec la Vierge et l'Enfant, environ 1160-1170, Atelier de [[Godefroy de Huy]], [[Cleveland Museum of Art]].
File:Huy 72 collegiale-arbre-vie.JPG|Médaillon émaillé "L'arbre de vie", vers 1160, Trésor de la [[Collégiale Notre-Dame de Huy]].
Huy 72 collegiale-arbre-vie.JPG|Médaillon émaillé "L'arbre de vie", vers 1160, Trésor de la [[Collégiale Notre-Dame de Huy]].
File:Mosan Workshop - Reliquary Cross - Google Art Project.jpg|Croix-Reliquaire, 1150-1175, [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
Mosan Workshop - Reliquary Cross - Google Art Project.jpg|Croix-Reliquaire, 1150-1175, [[Walters Art Museum]], [[Baltimore]].
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=== Ivoire ===
=== Ivoire ===
[[Image:Ivoire de Notger.jpg|thumb|right|140px|Évangéliaire de [[Notger de Liège|Notger]],<br />Ivoire du {{s-|X|e}}, émail du {{s-|XII|e}}, [[Grand Curtius]]]]
[[Image:Ivoire de Notger.jpg|thumb|right|140px|Évangéliaire de [[Notger de Liège|Notger]],<br />Ivoire du {{s-|X|e}}, émail du {{s-|XII|e}}, [[Grand Curtius]]]]
L’''Ivoire de Notger'' ou ''Évangéliaire de Notger'' est un [[évangéliaire]] du {{s-|X|e}} auquel des émaux ont été ajoutés au {{s-|XII|e}}<ref>[http://www.art-memoires.com/lettre/lm2426/24frbdiaa.htm art de Liège]</ref>. À lui seul il redonne le contexte de l'art mosan qui est à la fois d'Empire et d'Église. La politique ottonienne a mis en place un système politique fondé sur les évêques, qui sont comme des préfets de l'Empereur. Jacques Stiennon écrit les origines de l'art mosan dans l'art [[carolingien]] : « [Notger] saisit ici dans une attitude d'humilité, agenouillé à la fois devant la divinité entourée du [[tétramorphe]] (représentation des quatre évangélistes sous leur symbole animal) et un sanctuaire que l'on peut identifier avec l'église paroissiale [[Collégiale Saint-Jean de Liège|Saint-Jean l'Évangéliste]] de [[Liège]] ». La comparaison faite par Suzanne Collon-Gevaert avec une miniature représentant l'évêque Berward d'Hildesheim justifie cette interprétation (…) « Par l'ample douceur de ses volumes, l'œuvre a tous les caractères du style [[ottonien]] ver l'an mil, un style ottonien qui puise largement dans le trésor des formules carolingiennes »<ref>Jacques Stiennon, « L'art mosan », dans ''La Wallonie, le pays et les hommes'', tome I, Lettres, arts, culture, Bruxelles, 1977</ref>.
L’''Ivoire de Notger'' ou ''Évangéliaire de Notger'' est un [[évangéliaire]] du {{s-|X|e}} auquel des émaux ont été ajoutés au {{s-|XII|e}}<ref>[http://www.art-memoires.com/lettre/lm2426/24frbdiaa.htm art de Liège]</ref>. À lui seul il redonne le contexte de l'art mosan qui est à la fois d'Empire et d'Église. La politique ottonienne a mis en place un système politique fondé sur les évêques, qui sont comme des préfets de l'Empereur. Jacques Stiennon écrit les origines de l'art mosan dans l'art [[carolingien]] : « [Notger] saisit ici dans une attitude d'humilité, agenouillé à la fois devant la divinité entourée du [[tétramorphe]] (représentation des quatre évangélistes sous leur symbole animal) et un sanctuaire que l'on peut identifier avec l'église paroissiale [[Collégiale Saint-Jean de Liège|Saint-Jean l'Évangéliste]] de [[Liège]] ». La comparaison faite par Suzanne Collon-Gevaert avec une miniature représentant l'évêque Berward de Hildesheim justifie cette interprétation (…) « Par l'ample douceur de ses volumes, l'œuvre a tous les caractères du style [[ottonien]] ver l'an mil, un style ottonien qui puise largement dans le trésor des formules carolingiennes »<ref>Jacques Stiennon, « L'art mosan », dans ''La Wallonie, le pays et les hommes'', tome I, Lettres, arts, culture, Bruxelles, 1977</ref>.


=== Sculpture ===
=== Sculpture ===
[[File:Region mosane - Sedes Sapientiae.JPG|thumb|upright=0.4|[[Liège]], [[Grand Curtius]], ''Sedes Sapientiae'', bois, {{s-|XIII|e}}]]
[[File:Region mosane - Sedes Sapientiae.JPG|thumb|upright=0.4|[[Liège]], [[Grand Curtius]], ''Sedes Sapientiae'', bois, {{s-|XIII|e}}]]
{{refnec|La sculpture mosane prend pour support aussi bien la pierre que le bois, avec une préférence pour ce dernier matériau. Les sculptures sont peintes, souvent avec des couleurs vives. L'exécution est douce, avec beaucoup de rondeurs. Les modèles sont bien souvent idéalisés. Les proportions entre personnages, mais aussi entre la tête et le corps, sont modifiées pour accentuer le sujet. ces derniers sont, pour l'essentiel, tirés de la tradition chrétiennes : christs, vierges, saints...}}
{{refnec|La sculpture mosane prend pour support aussi bien la pierre que le bois, avec une préférence pour ce dernier matériau. Les sculptures sont peintes, souvent avec des couleurs vives. L'exécution est douce, avec beaucoup de rondeurs. Les modèles sont bien souvent idéalisés. Les proportions entre personnages, mais aussi entre la tête et le corps, sont modifiées pour accentuer le sujet. ces derniers sont, pour l'essentiel, tirés de la tradition chrétiennes : christs, vierges, saints…}}

On peut voir de très belles collections de sculptures mosanes au [[Trésor d'Hugo d'Oignies|Musée des Arts anciens du Namurois]] ainsi qu'au [[musée de la vie wallonne]], dans le [[Trésor de la cathédrale de Liège]] et au [[Grand Curtius]] à Liège.
On peut voir de très belles collections de sculptures mosanes au [[TreM.a – Musée des Arts anciens du Namurois|Musée des Arts anciens du Namurois]] ainsi qu'au [[musée de la vie wallonne]], dans le [[Trésor de la cathédrale de Liège]] et au [[Grand Curtius]] à Liège. La sculpture sur pierre se distingue également par la réalisation de fonts baptismaux, probablement d'inspiration gallo-romaine, généralement dotés de visages sculptés qui symbolisent les quatre fleuves de sagesse de la Bible. Les plus beaux exemples sont les [[fonts baptismaux de Saint-Barthélemy]] à [[Liège]], ceux de [[fonts baptismaux de Gentinnes|Gentinnes]], de [[fonts baptismaux de Saint-Séverin-en-Condroz|Séverin-en-Condroz]], de [[fonts baptismaux de Gerpinnes|Gerpinnes]], de [[fonts baptismaux de Beauvechain|Beauvechain]] et de [[Fonts baptismaux de Furnaux|Furnaux]].


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File:Curtius Romanesque capital.jpg|[[Liège]], [[Grand Curtius]]. Chapiteau de la cathédrale Saint Lambert de Liège
Curtius Romanesque capital.jpg|[[Liège]], [[Grand Curtius]]. Chapiteau de la cathédrale Saint Lambert de Liège
File:PICT1346-Wartburg-Kapitell-Dragons.JPG|[[Eisenach]]. Chapiteau en forme de dragon de la [[Wartburg]]
PICT1346-Wartburg-Kapitell-Dragons.JPG|[[Eisenach]]. Chapiteau en forme de dragon de la [[Wartburg]]
File:Vierge Dom Rupert.jpg|Liège, Grand Curtius. 'Vierge de Dom Rupert'
Vierge Dom Rupert.jpg|Liège, Grand Curtius. 'Vierge de Dom Rupert'
File:Pieterskerk - reliëf.JPG|[[Utrecht]], Église Saint Pierre. [[Ponce Pilate]] désignant le Christ
Pieterskerk - reliëf.JPG|[[Utrecht]], Église Saint Pierre. [[Ponce Pilate]] désignant le Christ
File:École mosane - Tympan d'Apollon.jpg|[[Liège]], [[Grand Curtius]]. Tympan d'Apollon
École mosane - Tympan d'Apollon.jpg|[[Liège]], [[Grand Curtius]]. Tympan d'Apollon
Fonts baptismaux de Furnaux 14.JPG|Fonts baptismaux de Furnaux. Le [[baptême du Christ]]
File:ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07873.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
Beauvechain - Fonts 05bis.JPG|Fonts baptismaux de Beauvechain
File:ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07874.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
Saint-Séverin - Fonts baptismaux 9.jpg|Fonts baptismaux de Saint-Séverin-en-Condroz
File:ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07875.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
Fonts baptismaux de Gerpinnes 08.JPG|Fonts baptismaux de Gerpinnes
ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07873.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07874.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
ID25072-CLT-0006-01-Nivelles Collégiale Ste-Gertrude-PM 07875.jpg|Nivelles, Collégiale Sainte Gertrude
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=== Peinture ===
=== Peinture ===
Très peu de vestiges nous sont parvenus de ce qui a dû être la quantité impressionnante de peintures murales mosanes. Wolfram von Eschenbach, dans son Parzival, a exprimé sa grande estime pour les peintures de Maastricht et de Cologne.

Très peu de vestiges nous sont parvenus de ce qui a dû être la quantité impressionnante de peintures murales mosanes. Wolfram von Eschenbach, dans son Parzival, a exprimé sa grande estime pour les peintures de Maastricht et de Cologne.


* Voûte du chœur de la basilique Saint-Servais de Maastricht
* Voûte du chœur de la basilique Saint-Servais de Maastricht
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{{Article détaillé|Abbayes mosanes|Enluminure ottonienne}}
{{Article détaillé|Abbayes mosanes|Enluminure ottonienne}}


*[[Bible de Stavelot]] ({{S-|XI}}). [[British Library]], [[Londres]]
* [[Bible de Stavelot]] ({{S-|XI}}). [[British Library]], [[Londres]]
*[[Bible de Floreffe]] ({{S-|XII}}). [[British Library]], [[Londres]]
* [[Bible de Floreffe]] ({{S-|XII}}). [[British Library]], [[Londres]]
*[[Bible de Lobbes]] ({{S-|XI}}). Musée du [[Séminaire de Tournai]]
* [[Bible de Lobbes]] ({{S-|XI}}). Musée du [[Séminaire de Tournai]]
*[[Évangéliaire]] d'[[Abbaye d'Averbode|Averbode]] ({{S-|XII}}). Bibliothèque universitaire, Liège
* [[Évangéliaire]] d'[[Abbaye d'Averbode|Averbode]] ({{S-|XII}}). Bibliothèque universitaire, Liège
*[[Évangéliaire]] de [[Notger]] ({{s mini-|X|e}}-{{s-|XII|e}})
* [[Évangéliaire]] de [[Notger]] ({{s mini-|X|e}}-{{s-|XII|e}})


=== Travail du cuivre ===
=== Travail du cuivre ===
Les [[fonts baptismaux de Saint-Barthélemy]] à [[Liège]] sont sans conteste le chef-d'œuvre de l'art mosan.
Les [[fonts baptismaux de Saint-Barthélemy]] à [[Liège]] sont sans conteste le chef-d'œuvre de l'art mosan.
Les fonts ont la forme d'une cuve cylindrique, dont le bord et la base sont profilés. Les parois représentent cinq scènes qui sont liées entre elles par le même sol ondulé. Au centre le baptême du [[Jésus de Nazareth|Christ]] dans le [[Jourdain]], avec [[saint Jean-Baptiste]], deux anges, la colombe du Saint-Esprit et la Main de Dieu. Vers la droite, le baptême du [[centurion]] [[Corneille (centurion)|Corneille]] par saint Pierre<ref>{{BFR|Ac|10}}</ref>, le baptême légendaire du philosophe [[Craton]] par [[saint Jean l'Évangéliste]], tous deux plongés dans une cuve cylindrique pareille à celle-ci. Suit la prédication de saint Jean dans le désert, devant quatre auditeurs dont un soldat. La dernière scène montre le baptême du [[publicain]]. Un arbuste sépare ce groupe de deux personnes qui assistent à l'évènement. Le centre de toutes les scènes est formé par le baptême du Christ. Les douze bœufs sont ceux qui portaient la ''[[Mer d'airain]]'' du Temple de [[Salomon (Bible)|Salomon]] et peuvent aussi figurer les douze apôtres. La ''Mer d'airain'' est également présentée comme préfiguration du baptême par [[Nicolas de Verdun]] sur l'ambon de [[Klosterneuburg]]. Le couvercle a disparu lors de la Révolution française.
Les fonts ont la forme d'une cuve cylindrique, dont le bord et la base sont profilés. Les parois représentent cinq scènes qui sont liées entre elles par le même sol ondulé. Au centre le baptême du [[Jésus de Nazareth|Christ]] dans le [[Jourdain]], avec [[saint Jean-Baptiste]], deux anges, la colombe du Saint-Esprit et la [[Main de Dieu (art)|main de Dieu]]. Vers la droite, le baptême du [[centurion]] [[Corneille (centurion)|Corneille]] par saint Pierre<ref>{{BFR|Ac|10}}</ref>, le baptême légendaire du philosophe [[Craton]] par [[saint Jean l'Évangéliste]], tous deux plongés dans une cuve cylindrique pareille à celle-ci. Suit la prédication de saint Jean dans le désert, devant quatre auditeurs dont un soldat. La dernière scène montre le baptême du [[publicain]]. Un arbuste sépare ce groupe de deux personnes qui assistent à l'évènement. Le centre de toutes les scènes est formé par le baptême du Christ. Les douze bœufs sont ceux qui portaient la ''[[Mer d'airain]]'' du Temple de [[Salomon (Bible)|Salomon]] et peuvent aussi figurer les douze apôtres. La ''Mer d'airain'' est également présentée comme préfiguration du baptême par [[Nicolas de Verdun]] sur l'ambon de [[Klosterneuburg]]. Le couvercle a disparu lors de la Révolution française.


Les figures sont traitées dans un style extrêmement plastique comme si elles évoluaient sur la scène d'un théâtre. Le fond est uniquement constitué par la paroi lisse de la cuve, ce qui accentue considérablement l'effet de profondeur. Par ce procédé les fonts de Liège se situent entre la conception illusionniste de l'[[art carolingien]] et la conception de l'[[art roman]], conception qui distingue nettement l'action des personnages et l'arrière-plan uni devant lequel ils évoluent. C'est une tendance qu'on perçoit aussi dans la sculpture antique, notamment l’[[Arc de Septime Sévère|arc de triomphe de Septime Sévère]]. D'autres influences antiques jouent : liberté des mouvements et des gestes, le rapport des vêtements et du corps. Ces éléments stylistiques se trouvent déjà dans la sculpture de l'[[art ottonien]], dans certain ivoire de Liège aux petites figures qui est reconnu comme un des jalons précurseurs du style de [[Renier de Huy]]. Cela vaut pour les vêtements. La structure de leurs plis sera déterminante pour l'évolution des différents courants stylistiques dans la région Meuse-Rhin au {{XIIe siècle}}.
Les figures sont traitées dans un style extrêmement plastique comme si elles évoluaient sur la scène d'un théâtre. Le fond est uniquement constitué par la paroi lisse de la cuve, ce qui accentue considérablement l'effet de profondeur. Par ce procédé les fonts de Liège se situent entre la conception illusionniste de l'[[art carolingien]] et la conception de l'[[art roman]], conception qui distingue nettement l'action des personnages et l'arrière-plan uni devant lequel ils évoluent. C'est une tendance qu'on perçoit aussi dans la sculpture antique, notamment l’[[Arc de Septime Sévère|arc de triomphe de Septime Sévère]]. D'autres influences antiques jouent : liberté des mouvements et des gestes, le rapport des vêtements et du corps. Ces éléments stylistiques se trouvent déjà dans la sculpture de l'[[art ottonien]], dans certains ivoires de Liège aux petites figures qui est reconnu comme un des jalons précurseurs du style de [[Renier de Huy]]. Cela vaut pour les vêtements. La structure de leurs plis sera déterminante pour l'évolution des différents courants stylistiques dans la région Meuse-Rhin au {{XIIe siècle}}.
{{Article détaillé|fonts baptismaux de Saint-Barthélemy}}
{{Article détaillé|fonts baptismaux de Saint-Barthélemy}}


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Image:Renier de Huy JPG00.jpg|[[Fonts baptismaux de Saint-Barthélemy]], Liège
Renier de Huy JPG00.jpg|[[Fonts baptismaux de Saint-Barthélemy]], Liège
Image:Renier_de_Huy_MCL2.jpg|Détail des fonts baptismaux de Saint-Barthélemy
Renier_de_Huy_MCL2.jpg|Détail des fonts baptismaux de Saint-Barthélemy
Image:Renier de Huy JPG04.jpg|Détail des fonts baptismaux de Saint-Barthélemy
Renier de Huy JPG04.jpg|Détail des fonts baptismaux de Saint-Barthélemy
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== Galerie ==
== Galerie ==
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File:Musée Cinquantenaire Sedes sapientiae.jpg|Vierge à l'enfant de type Sedes sapientiae, {{s-|XI|e}}, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
Musée Cinquantenaire Sedes sapientiae.jpg|Vierge à l'enfant de type Sedes sapientiae, {{s-|XI|e}}, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
File:Triptyque of Florennes opened.jpg|Triptyque de l'[[abbaye de Florennes]], 1200-1210, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
Triptyque of Florennes opened.jpg|Triptyque de l'[[abbaye de Florennes]], 1200-1210, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
File:NoodkistPendantenBrusselseOriginelenGondulfus01.jpg|Reliquaire de Saint Gondulph, Maastricht?, {{s-|XII|e}}, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
NoodkistPendantenBrusselseOriginelenGondulfus01.jpg|Reliquaire de Saint Gondulph, Maastricht?, {{s-|XII|e}}, [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
File:MRAH Aquamanile Aristote et Phyllis 261211.jpg|Aquamanile représentant Aristote et Phyllis, première moitié du {{s-|XV|e}}, région mosane (?), [[Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles|Musées royaux d'Art et d'Histoire, section des Arts décoratifs européens]], [[Bruxelles]]
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== Notes et références ==
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== Voir aussi ==
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=== Articles connexes ===
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* [[Grand Curtius]]
* [[Grand Curtius]]
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* ''L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}}'', collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), Éditions du Perron, Liège, 2007, {{ISBN|978-2-87114-217-1}}.
* ''L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du {{Sp-|XI|e|au|XIII|e}}'', collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), Éditions du Perron, Liège, 2007, {{ISBN|978-2-87114-217-1}}.
* Sophie Balace, ''Historiographie de l'art mosan'', Thèse soutenue à l'université de Liège, janvier 2009, 937 p. ([http://bictel.ulg.ac.be/ETD-db/collection/available/ULgetd-01112009-143217/unrestricted/Historiographie_de_l_art_mosan_-_These.pdf lire en ligne])
* Sophie Balace, ''Historiographie de l'art mosan'', Thèse soutenue à l'université de Liège, janvier 2009, 937 p. ([http://bictel.ulg.ac.be/ETD-db/collection/available/ULgetd-01112009-143217/unrestricted/Historiographie_de_l_art_mosan_-_These.pdf lire en ligne])
*Chapman, Gretel (1987). "Mosan art". ''Dictionary of the Middle Ages''. Volume 8. {{p.|495–6}}
* Chapman, Gretel (1987). "Mosan art". ''Dictionary of the Middle Ages''. Volume 8. {{p.|495–6}}
*Hartog, Elizabeth den (2002). ''Romanesque Sculpture in Maastricht''
* Hartog, Elizabeth den (2002). ''Romanesque Sculpture in Maastricht''
*Timmers, J.J.M. (1971). ''De Kunst van het Maasland''
* Timmers, J.J.M. (1971). ''De Kunst van het Maasland''
* R.P. Denis, ''Un chef-d'œuvre de l'orfèvrerie mosane au musée du Louvre'', Bulletin du Vieux Liège, n°162, tome VII, 1968.
* R.P. Denis, ''Un chef-d'œuvre de l'orfèvrerie mosane au musée du Louvre'', Bulletin du Vieux Liège, n°162, tome VII, 1968.
*[http://www.britannica.com/eb/article-9053873/Mosan-school "Mosan school"]. In online ''[[Encyclopædia Britannica]]''
* [http://www.britannica.com/eb/article-9053873/Mosan-school "Mosan school"]. In online ''[[Encyclopædia Britannica]]''
*{{Ouvrage |titre=L'Œuvre de la Meuse : Orfèvrerie mosane {{XIIe}}-{{XIIIe}} siècles |éditeur= |collection=Feuillets de la cathédrale de Liège |année=2015 |pages totales=179 |isbn=}}
* {{Ouvrage |titre=L'Œuvre de la Meuse : Orfèvrerie mosane {{sp-|XII|-|XIII}}s |éditeur= |collection=Feuillets de la cathédrale de Liège |année=2015 |pages totales=179 |isbn=}}


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Collégiale Saint-Barthélemy de Liège
Triptyque de Stavelot, Morgan Library, New York

L’art mosan est un art roman d'influence carolingienne et ottonienne de la vallée de la Meuse, actif du XIe au XIIIe siècle. La région mosane correspond aux frontières de l'ancien diocèse de Liège qui s'étendait principalement dans le territoire de l'actuelle Belgique, mais également sur une partie de la France, des Pays-Bas et de l'Allemagne.

Contexte historique

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L'Empire vers l'an mil

En 843, le traité de Verdun divise l'empire carolingien en trois royaumes dirigés par les petits-fils de Charlemagne. Enjeu de luttes entre les royaumes de Francie occidentale et de Francie orientale, la Lotharingie est rattachée au Saint-Empire en 925 et devient un duché au début du Xe siècle. En 923, Henri Ier de Germanie traverse le Rhin et s'empare de la Lotharingie. En 925, les Lotharingiens l'élisent comme roi, grâce à l'appui de Gislebert. La vallée de l'Escaut fixe définitivement la frontière entre France et Germanie. Le couronnement d'Otton Ier comme empereur le 2 février 962[1] est retenu comme la date de fondation du Saint-Empire romain. Le Saint-Empire obtient une légitimation temporelle, mais aussi sacrée en tant que nouvel Imperium Romanum. L'art ottonien participe à une renaissance et la volonté des empereurs de la nouvelle dynastie ottonienne de restaurer le Saint-Empire romain germanique. Elle s'étend de la Mer du Nord et de la Baltique aux régions alpines et de la Saône au-delà de l'Elbe et de Magdebourg. En 980, l'empereur germanique Otton II accorde des pouvoirs séculiers à l'évêque Notger qui devient le premier prince-évêque. Ce domaine va progressivement s'accroître, s'émanciper de l’Empire et devenir un État indépendant, la Principauté de Liège, État qui ne recouvrira jamais, en son maximum d’extension, qu’un tiers environ du diocèse. Au Xe siècle, Liège, surnommée l'Athènes du Nord, devient la capitale d'une puissante principauté épiscopale, grâce à l'action des évêques Éracle, Notger et Wazon. La ville devient un des principaux centres intellectuels d'Europe occidentale. Ses écoles sont célèbres jusqu'au XIIe siècle, de nombreux étudiants brillants, originaires de diverses contrées, y sont formés[2]. Sept collégiales s'élèvent alors dans la ville, en plus de la cathédrale, où est enterré saint Lambert. Deux abbayes bénédictines s'y ajoutent : Saint-Jacques et Saint-Laurent. Tous ces bâtiments religieux forment comme une couronne d'églises autour de la cathédrale, épicentre religieux et politique du diocèse, cœur de la cité de saint Lambert. En 1096, départ en croisade de Godefroid de Bouillon, duc de Basse Lotharingie. Du XIe au XIIIe siècle, épanouissement de l’Art mosan, art roman d'influence carolingienne et ottonienne, dans l'ancien diocèse de Liège qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne[3]. Développement des abbayes mosanes : Saint-Laurent de Liège, Stavelot, Nivelles, Aulne, Floreffe, Florennes, Flône, Celles, Gembloux et Lobbes. Individualisation de la langue wallonne dans la partie romane du diocèse de Liège.

Développement et aire géographique

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Cette carte représente l'ancien Diocèse de Liège (en jaune). Les provinces modernes de Liège et du Limbourg sont également indiquées. L'orange représente les frontières régionale (Flandre et Wallonie) ou nationales modernes.

La vallée de la Meuse réside dans le cœur de l'Empire carolingien et donc le style mosan s'inspire largement de la tradition de l'art carolingien. Ainsi, il contient des éléments classiques forts, qui le sépare de l'art roman international, vu ailleurs au cours de la période, par exemple en France, en Allemagne, en Angleterre et en Italie. Toutefois, il partage certains éléments de l'art roman, tels que le traitement de l'espace. Bien que l'iconographie mosane du XIe et XIIe siècles s'inspire largement de thèmes bibliques, certains chapiteaux richement sculptés dans les deux principales églises de Maastricht représentent des scènes de la vie quotidienne[4].

La région mosane a été formée en grande partie par les limites de l'évêché de Liège, qui avait de solides liens politiques avec les empereurs du Saint-Empire romain germanique et les évêques de Cologne. Les principaux centres artistiques de la région ont été les villes de Liège, Huy, Dinant, Namur, Tongres, Maastricht, Roermond et Aix-la-Chapelle, ainsi qu'un certain nombre de monastères importants : Saint-Trond, Aldeneik, Herkenrode, Averbode, Munsterbilzen, Susteren, Sint-Odiliënberg, Rolduc, Burtscheid, Kornelimünster, Stavelot, Nivelles, Aulne, Floreffe, Flône, Celles, Gembloux, Florennes, et Lobbes. À son apogée, l'art mosan a eu une forte influence sur les régions limitrophes, notamment en Rhénanie (Cologne, Bonn), jusque Tournai et l'Autriche[4].

Historiographie

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Le chanoine Lemaire est le premier à définir deux écoles - une scaldienne et une mosane - d'art roman en Belgique, en 1906[5].

Félix Rousseau écrit à propos de l'art mosan :

« Le pays mosan correspond à l'ancien diocèse de Liège. Je dis diocèse et non principauté ecclésiastique - ce sont des choses distinctes qu'il faut se garder de confondre - la principauté étant une création, politique (...) Le diocèse a formé une véritable entité, non seulement au point de vue religieux, mais aussi au point de vue intellectuel et artistique, au point de vue folklorique (en ce qui concerne les croyances et les usages traditionnels) et, de même au point de vue dialectal »

— Félix Rousseau, La Wallonie, terre romane suivi de L'Art mosan, IJD, Charleroi, 1993, p. 128-129

Selon Albert Lemeunier, ancien conservateur du musée d'art religieux et d'Art mosan, cet art essentiellement religieux « témoigne de l'apport essentiellement wallon à l'art et à la spiritualité non seulement de la Wallonie, mais aussi du monde occidental. Il tient son universalité de ce qu'il fut capable de donner autant que de recevoir »[6].

Selon Philippe George, conservateur du trésor de la cathédrale de Liège, « La Meuse et tous ses affluents irriguent une région dont la culture et la religion font l'unité et l'identité : le pays mosan. À l'ouest et au sud, le diocèse de Liège ne recouvre pas toute la Wallonie, mais il la dépasse très largement vers le nord »[7].

Architecture mosane

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Volume reconstitué de la cathédrale ottonienne de Liège au XIe siècle

Les basiliques à transept bas

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L'école mosane dont certains caractères l'unisse à la région de Cologne, s'affirme dans le premier quart du XIe siècle en Wallonie, dans l'ancien diocèse de Liège, en remontant la Meuse parfois jusqu'en Lorraine. Les exemples proches de l'an mil, presque définitifs sont repris dans la période romane. Elle est caractérisée par des édifices bas avec des chœurs triples, des absidioles attenantes à l'abside principale, la nef est massive, avec des piliers rectangulaires. La façade Ouest est mise en valeur par un clocher unique et un décor mural de grandes arcades aveugles. Nivelle en est la plus belle expression. Les édifices à transept bas participent au renouvellement des formes pré-romanes. La nef se poursuit indivise jusqu'à l'entrée de l'abside, les deux croisillons sont séparés d'elle par des murs avec des ouvertures plus ou moins larges. Les deux bras du transept sont plus bas et souvent plus étroits que la nef principale. Il n'y a pas de croisée du transept par l'absence d'arcs d'encadrement Est et Ouest. Dans la composition spatiale de la nef, l'architecture ottonienne ignore la travée. Les murailles des églises autour de l'an mil sont inarticulées et les grandes arcades découpées à l'emporte-pièce dans des parois unies. Elles peuvent être groupées avec une certaine variété grâce aux supports alternés mais souvent les tribunes au-dessus des arcades n'en reprennent pas le rythme.

Le massif occidental

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Ce refus de la travée entraîne une grande variété de supports. Les supports cruciformes n'apparaissent qu'à la jonction des arcs de la croisée du transept ou à la retombée des arcs diaphragmes qui partagent en deux la longueur de la nef comme à la Collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles. Le massif occidental ottonien a pour origine le westwerk carolingien à plan central qui est une plateforme élevée sur une crypte de plain-pied avec le sol de l'église et qui sert de passage vers l'Ouest. Le Westbau se trouvait principalement dans les monastères impériaux dans lesquels résidaient des rois ou des empereurs itinérants. Réservé à eux et à leur entourage, le Westbau sera surtout utilisé à des fins laïques jusqu'à la réforme clunisienne, par exemple en tant que chancellerie ou tribunal. D'une galerie s'ouvrant à l'église, le souverain pouvait prendre part au service depuis une position élevée. La structure traditionnelle de l'église avait deux significations : l'église proprement dite à l'est, réservée aux saints, et un ouvrage en forme de rempart, place du souverain en tant que protecteur de l'église. La signification symbolique du Westbau était celle d'une forteresse. Alors que l'est (lever du soleil) était la direction du Christ et de l'abside qui abritait l'autel, les pouvoirs du mal et de la mort étaient assignés à l'ouest (coucher du soleil) et n'étaient pas autorisés à accéder à l'église.

Zone de diffusion

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La zone de diffusion de l'art mosan qui compte des villes telles Maastricht et Aix-la-Chapelle, subit l'influence de l'art carolingien dont elle est en quelque sorte le prolongement[8]. La région la plus riche est celle de la Wallonie et des pays de la Meuse avec l'abbatiale de Celles-les-Dinant, le prieuré de Hastière-par-Delà de 1033-1035, la collégiale Saint-Denis de Liège dont il reste des murs des environs de l'an mil, Wessem près de Roermond aussi de l'an mil et Aubechies. Le chef-d'œuvre de cette architecture est la collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles dont le massif occidental du XIIe siècle remplace un autre chœur carolingien ou ottonien. On peut dater les débuts de construction vers l'an mil avec une consécration en 1046, le transept vers 1050 et le chœur oriental peu après. L'abatiale de Morienval dans son état du XIe siècle peut aussi être rattachée à ce même courant architectural. Parmi les principaux édifices religieux d'art mosan, on peut citer :[réf. nécessaire]

Les autres domaines de l'art mosan

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Orfèvrerie

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À l’époque romane, le renouveau des sacrements et le culte des reliques provoquent un essor de l’orfèvrerie religieuse. La dinanderie est pratiquée au début du XIe siècle dans la vallée de la Meuse, d'abord à Huy puis à Dinant (ville d'où cette discipline tire son nom). Elle est probablement à l'origine d'une importante tradition d'orfèvrerie liturgique qui se répand dans tout le pays mosan et produit des châsses, reliquaires, croix, reliures d'une grande richesse. Parmi les chefs-d'œuvre de l'art mosan en orfèvrerie, on peut citer le Triptyque de Stavelot, la châsse de Notre-Dame de la cathédrale de Tournai, le Trésor d'Hugo d'Oignies à Namur, le chef-reliquaire du pape Alexandre des Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles et la châsse de Saint-Maur visible en République tchèque, ou encore les œuvres de Nicolas de Verdun, comme la châsse des rois mages, conservée à la cathédrale de Cologne et le célèbre retable conservé à Vienne (Autriche). Citons également la couronne-reliquaire dite Couronne de Liège, offerte par le roi de France saint Louis au couvent des dominicains de Liège, ou encore le reliquaire du bras de Charlemagne, réalisé à la demande de l'empereur Frédéric Barberousse, qui sont exposés au Louvre. Ces œuvres sont caractérisées par une grande finesse révélant la haute maîtrise technique des orfèvres mosans de l'époque[4].

La technique du champlevé est particulièrement associée à l'art mosan. Cette technique de travail de l'émail s'est développée à la fin du XIe siècle. Les émaux mosans sont, avec ceux de Limoges, les plus célèbres. Le travail pouvait également être réalisé sur l'or ou le vermeil[9]. Le Triptyque de Stavelot exposé à New York constitue une des plus belles œuvres mosanes. L'Autel portatif de Stavelot, visible dans la salle aux trésors des Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles, constitue une autre œuvre remarquable.

Évangéliaire de Notger,
Ivoire du Xe siècle, émail du XIIe siècle, Grand Curtius

L’Ivoire de Notger ou Évangéliaire de Notger est un évangéliaire du Xe siècle auquel des émaux ont été ajoutés au XIIe siècle[10]. À lui seul il redonne le contexte de l'art mosan qui est à la fois d'Empire et d'Église. La politique ottonienne a mis en place un système politique fondé sur les évêques, qui sont comme des préfets de l'Empereur. Jacques Stiennon écrit les origines de l'art mosan dans l'art carolingien : « [Notger] saisit ici dans une attitude d'humilité, agenouillé à la fois devant la divinité entourée du tétramorphe (représentation des quatre évangélistes sous leur symbole animal) et un sanctuaire que l'on peut identifier avec l'église paroissiale Saint-Jean l'Évangéliste de Liège ». La comparaison faite par Suzanne Collon-Gevaert avec une miniature représentant l'évêque Berward de Hildesheim justifie cette interprétation (…) « Par l'ample douceur de ses volumes, l'œuvre a tous les caractères du style ottonien ver l'an mil, un style ottonien qui puise largement dans le trésor des formules carolingiennes »[11].

Liège, Grand Curtius, Sedes Sapientiae, bois, XIIIe siècle

La sculpture mosane prend pour support aussi bien la pierre que le bois, avec une préférence pour ce dernier matériau. Les sculptures sont peintes, souvent avec des couleurs vives. L'exécution est douce, avec beaucoup de rondeurs. Les modèles sont bien souvent idéalisés. Les proportions entre personnages, mais aussi entre la tête et le corps, sont modifiées pour accentuer le sujet. ces derniers sont, pour l'essentiel, tirés de la tradition chrétiennes : christs, vierges, saints…[réf. nécessaire]

On peut voir de très belles collections de sculptures mosanes au Musée des Arts anciens du Namurois ainsi qu'au musée de la vie wallonne, dans le Trésor de la cathédrale de Liège et au Grand Curtius à Liège. La sculpture sur pierre se distingue également par la réalisation de fonts baptismaux, probablement d'inspiration gallo-romaine, généralement dotés de visages sculptés qui symbolisent les quatre fleuves de sagesse de la Bible. Les plus beaux exemples sont les fonts baptismaux de Saint-Barthélemy à Liège, ceux de Gentinnes, de Séverin-en-Condroz, de Gerpinnes, de Beauvechain et de Furnaux.

Très peu de vestiges nous sont parvenus de ce qui a dû être la quantité impressionnante de peintures murales mosanes. Wolfram von Eschenbach, dans son Parzival, a exprimé sa grande estime pour les peintures de Maastricht et de Cologne.

  • Voûte du chœur de la basilique Saint-Servais de Maastricht
Bible de Floreffe, début de l'évangile de Jean, milieu du XIIe siècle

La technique de l'enluminure était à son zénith dans la seconde moitié du XIIe siècle. Les principaux centres artistiques étaient l'abbaye de Saint-Laurent à Liège et les abbayes de Stavelot et de Lobbes[4].

Travail du cuivre

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Les fonts baptismaux de Saint-Barthélemy à Liège sont sans conteste le chef-d'œuvre de l'art mosan. Les fonts ont la forme d'une cuve cylindrique, dont le bord et la base sont profilés. Les parois représentent cinq scènes qui sont liées entre elles par le même sol ondulé. Au centre le baptême du Christ dans le Jourdain, avec saint Jean-Baptiste, deux anges, la colombe du Saint-Esprit et la main de Dieu. Vers la droite, le baptême du centurion Corneille par saint Pierre[12], le baptême légendaire du philosophe Craton par saint Jean l'Évangéliste, tous deux plongés dans une cuve cylindrique pareille à celle-ci. Suit la prédication de saint Jean dans le désert, devant quatre auditeurs dont un soldat. La dernière scène montre le baptême du publicain. Un arbuste sépare ce groupe de deux personnes qui assistent à l'évènement. Le centre de toutes les scènes est formé par le baptême du Christ. Les douze bœufs sont ceux qui portaient la Mer d'airain du Temple de Salomon et peuvent aussi figurer les douze apôtres. La Mer d'airain est également présentée comme préfiguration du baptême par Nicolas de Verdun sur l'ambon de Klosterneuburg. Le couvercle a disparu lors de la Révolution française.

Les figures sont traitées dans un style extrêmement plastique comme si elles évoluaient sur la scène d'un théâtre. Le fond est uniquement constitué par la paroi lisse de la cuve, ce qui accentue considérablement l'effet de profondeur. Par ce procédé les fonts de Liège se situent entre la conception illusionniste de l'art carolingien et la conception de l'art roman, conception qui distingue nettement l'action des personnages et l'arrière-plan uni devant lequel ils évoluent. C'est une tendance qu'on perçoit aussi dans la sculpture antique, notamment l’arc de triomphe de Septime Sévère. D'autres influences antiques jouent : liberté des mouvements et des gestes, le rapport des vêtements et du corps. Ces éléments stylistiques se trouvent déjà dans la sculpture de l'art ottonien, dans certains ivoires de Liège aux petites figures qui est reconnu comme un des jalons précurseurs du style de Renier de Huy. Cela vaut pour les vêtements. La structure de leurs plis sera déterminante pour l'évolution des différents courants stylistiques dans la région Meuse-Rhin au XIIe siècle.

Notes et références

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  1. Rapp 2003, p. 56.
  2. ^Rayonnement international
  3. L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du XIe au XIIIe siècle, collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), Éditions du Perron, Liège, 2007, (ISBN 978-2-87114-217-1).
  4. a b c et d Benoît Van den Bossche (dir.), L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du XIe au XIIIe siècle, Liège, Éditions du Perron,
  5. André Courtens et Jean Roubier, Belgique romane : architecture, art monumental, Bruxelles, M. Vokaer, 1969, p. 25
  6. Albert Lemeunier, L'Art mosan, reflet de la pensée chrétienne en Wallonie, tome II, p. 45-67
  7. Philippe George, « Les arts au Moyen Âge », dans Histoire de la Wallonie de la préhistoire au XXIe siècle (sous la direction de Bruno Demoulin et Jean-Louis Kupper), Privat Toulouse, 2004, p. 126-163
  8. Belgique Luxembourg, Le Guide vert, Michelin, 2008, p. 42.
  9. * Osborne, Harold (ed), The Oxford Companion to the Decorative Arts, 1975, OUP, (ISBN 0-19-866113-4)
  10. art de Liège
  11. Jacques Stiennon, « L'art mosan », dans La Wallonie, le pays et les hommes, tome I, Lettres, arts, culture, Bruxelles, 1977
  12. Ac 10

Articles connexes

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Bibliographie

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  • Félix Rousseau, « La Meuse et le pays mosan. Leur importance historique avant le XIIIe siècle », Annales de la Société archéologique de Namur, vol. XXXIX, 1930, réédité en 1977.
  • Rhin-Meuse : Art et civilisation 800-1400, catalogue de l'exposition organisée du 14 mai au 23 juillet 1972 à Cologne et du 19 septembre au 31 octobre à Bruxelles, Bruxelles-Cologne, 1972.
  • L'Art mosan. Liège et son pays à l'époque romane du XIe au XIIIe siècle, collectif sous la direction de Benoît Van den Bossche (avec la collaboration de Jacques Barlet), Éditions du Perron, Liège, 2007, (ISBN 978-2-87114-217-1).
  • Sophie Balace, Historiographie de l'art mosan, Thèse soutenue à l'université de Liège, janvier 2009, 937 p. (lire en ligne)
  • Chapman, Gretel (1987). "Mosan art". Dictionary of the Middle Ages. Volume 8. p. 495–6
  • Hartog, Elizabeth den (2002). Romanesque Sculpture in Maastricht
  • Timmers, J.J.M. (1971). De Kunst van het Maasland
  • R.P. Denis, Un chef-d'œuvre de l'orfèvrerie mosane au musée du Louvre, Bulletin du Vieux Liège, n°162, tome VII, 1968.
  • "Mosan school". In online Encyclopædia Britannica
  • L'Œuvre de la Meuse : Orfèvrerie mosane XIIe – XIIIe siècles, coll. « Feuillets de la cathédrale de Liège », , 179 p.

Liens externes

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  • Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généralisteVoir et modifier les données sur Wikidata :