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« Camps de Jalès » : différence entre les versions

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L'appellation '''camps de Jalès''' fait référence à une série d’événements qui se sont déroulés immédiatement après la [[Grande Peur]] au début de la période [[Révolution française|révolutionnaire]], entre {{date-||août|1790}} et {{date-||juillet|1792}} en [[Ardèche (département)|Ardèche]], sur le territoire des communes de [[Banne]], [[Beaulieu (Ardèche)|Beaulieu]] et [[Berrias-et-Casteljau]], dans le canton des [[Les Vans|Vans]].
{{sources à lier}}


Il ne s'agit pas d'un mouvement isolé, mais de manifestations proches de celles que l’on retrouve dans l’[[Ain (département)|Ain]], le [[Comtat Venaissin]], [[Arles]], d’abord dans un contexte fédératif puis évoluant vers une réaction contre-révolutionnaire, souvent à la suite d’affrontements entre catholiques et protestants ([[Nîmes]], [[Uzès]]).
Les '''camps de Jalès''' sont une série d’événements qui se sont déroulés pendant la période [[Révolution française|Révolutionnaire]], entre Août 1790 et Juillet 1792( soit moins de 2 ans) dans le département de l’[[Ardèche (département)|Ardèche]] sur le territoire des communes de [[Banne]], [[Beaulieu]] et [[Berrias-et-Casteljau]].


==Le pays de Jalès==
== Le pays de Jalès ==
Il est important de situer le pays : à la limite entre l’[[Ardèche (département)|Ardèche]] ([[Vivarais]]) et le [[Gard]], à proximité d’[[Alès]], du pays d’Uzége, la plaine de Jalès est aussi une zone de contact entre catholiques et protestants, marquée par la présence ancienne des Templiers et la proximité de les [[Cévennes]] protestantes.
Le pays se situe à la limite entre l’[[Ardèche (département)|Ardèche]] ([[Vivarais]]) et le [[Gard]], à proximité d’[[Alès]], du pays d’[[Uzès|Uzège]]. La plaine de Jalès est aussi une zone de contact entre catholiques et protestants, marquée par la présence ancienne des templiers et la proximité des [[Cévennes]] protestantes.


== La période révolutionnaire ==
==La Commanderie==

=== Le contexte : la Révolte des Masques armés ===
En 1782 et 1783, des bandits masqués sévirent entre [[les Vans]]<ref>{{lien web |titre=Les vans (07140) |url=http://www.medarus.org/Ardeche/07commun/07comTex/vans.htm |site=medarus.org |consulté le=09-06-2023}}.</ref> et [[Saint-Ambroix (Gard)]], nécessitant l’envoi de troupes commandées par [[Henri Cabot de Dampmartin]]. Cette révolte contre la bourgeoisie était le fait de pauvres gens. Les responsables furent pendus ou roués aux [[Les Vans|Vans]] le {{nobr|25 octobre}} [[1783]], certains envoyés aux galères<ref name="Règnè">{{harvsp|Règnè|1916}}</ref>{{,}}<ref>Jean Régnè, op cité</ref>{{,}}<ref>{{lien web |langue=en |titre=La Revolte des Masques Armes 1782 |url=https://archive.org/stream/LaRevolteDesMasquesArmes1782-1783/RevolteDesMasquesArmes#page/n3/mode/2up |site=[[Internet Archive]] |consulté le=09-06-2023}}.</ref>. Beaucoup furent néanmoins graciés.

Albin Mazon, dans sa notice sur l'ancienne paroisse de [[Jaujac]] <ref>(pages 244 à 257)</ref>, raconte que l'un des condamnés à la roue l'avait été par contumace. Il s'appelait Degout-Lachamp et se serait caché dans les bois jusqu'en 1789, puis à la faveur des événements aurait eu une activité de brigandages avec d'anciens complices jusqu'en 1796, date à laquelle il aurait été repris à la faveur d'un complot royaliste qu'il aurait voulu dénoncer.

=== Le premier camp : fête fédérative et défense des catholiques ===
C'est le 11 juillet 1790, au château du [[Louis Henri Scipion du Roure|comte du Roure]] à Banne, que les membres des conseils municipaux des communes voisines demandent que l'[[Assemblée constituante de 1789|Assemblée constituante]] soit chargée d'organiser un rassemblement des gardes nationaux<ref>{{harvsp|Jolivet|1930}}</ref>.

Le 18 août, à l’appel de [[Louis Bastide de Malbos]]<ref>[[Christian de Seauve]], ''Caraman 1581-1858. Chronique d’une maison l’hôtel de Malbos, son environnement catholique et protestant''. Les collectionneurs amateurs 31460 Caraman. 1998</ref>, maire de [[Berrias-et-Casteljau|Berrias]], commune sur laquelle est implantée la [[Commanderie de Jalès]], se réunissent {{formatnum:15000}} à {{formatnum:20000}} gardes nationaux et plusieurs milliers de catholiques en réponse aux événements survenus à [[Nîmes]], où des [[protestants]], majoritairement favorables aux idées progressistes massacrèrent des catholiques.<br />
Ce rassemblement pouvait passer pour une fête locale à l’image de la célébration dite [[Fête de la Fédération]] du 14 juillet 1790 à [[Paris]].
Rivière de Larque, procureur syndic de Largentière, tente de tirer un avantage politique de cette manifestation.
{{refnec|Il y eut peut-être quiproquo entre ceux qui venaient défendre la religion catholique et ceux qui voulaient fêter les idées nouvelles ?}}

Une messe est célébrée. Certains veulent marcher sur [[Nîmes]], mais cette éventualité est écartée par les organisateurs.

Toutes les villes de l'Ardèche méridionale y étaient représentées à l'exception de [[Joyeuse (Ardèche)|Joyeuse]]<ref>Mazon, ''Histoire de Largentière'', p. 393</ref>.
[[File:Compte-rendu du premier camp de Jalès-1790.pdf|thumb|Scan d'un document original.|alt=]]

Les maires de l’Ardèche méridionale, leurs conseillers et leurs gardes nationaux se réunissent et proclament leur fidélité au Roi<ref>{{lien web |langue=en |titre=Proces-verbal du premier camp de Jales. : Alain Auzas : Free Download, Borrow, and Streaming : Internet Archive |url=https://archive.org/details/Proces-verbalDuPremierCampDeJales |site=[[Internet Archive]] |consulté le=09-06-2023}}.</ref>.

Cependant, après le départ des gardes, certains s’organisent et leurs officiers se proclament [[état-major]] ou comité militaire d’une armée fédérée. Cette démarche est déclarée inconstitutionnelle par l’Assemblée nationale à la demande du Directoire du département de l’Ardèche (proclamation du 26 août [[1790]]) dans un décret du 7 septembre 1790 promulgué par le roi le {{nobr|12 septembre}}.

Ce comité dont le principal élément est [[Claude Allier]], prieur de [[Chambonas (Ardèche)|Chambonas]], sera le fil rouge reliant le premier rassemblement aux deux autres. Il fait l'amalgame entre les protestants et les patriotes qui accaparent tous les postes et relèguent les catholiques à des fonctions subalternes.
Le prieur de [[Chambonas (Ardèche)|Chambonas]], catholique et monarchiste, sera un lien avec les princes émigrés.

Dès lors, tout rassemblement - que ce soit dans la plaine de Jalès ou dans tout le [[Royaume de France|Royaume]] - devient illégal, sauf autorisation du Directoire départemental.


À l’origine une ancienne grange attribuée aux chevaliers du Temple au début du {{s-|XII|e}} qui en firent une [[commanderie]].
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File:Septembre 1790-Proclamation Royale 1.JPG|Le Roi défend les {{nobr|rassemblements. (1)}}
File:Commanderie de Jalès - vue générale.jpg|Vue générale
File:Septembre 1790-Proclamation Royale-2.JPG|Le Roi défend les {{nobr|rassemblements. (2)}}
File:Commanderie de Jalès - le porche.jpg|le porche
File:Septembre 1790-Proclamation Royale 3.JPG|Le Roi défend les {{nobr|rassemblements. (3)}}
File:La Commanderie de Jalès-Porte fortifiée..JPG ‎
File:Proclamation directoire aout 1790.JPG|Le Directoire tire les conclusions.
File:Commanderie de Jalès-La cour.jpg|la cour
</gallery>
File:Commanderie de Jalès - le puits.jpg|le puits
</gallery>


=== Le deuxième camp : réaction religieuse ===
===les Templiers===
L’[[Ordre du Temple]] fut créé en 1129 à partir de l’Ordre des Pauvres Chevaliers du Christ et du [[Temple de Salomon ]]. Leur mission aux {{s2-|XII|e|XIII|e}} fut la protection des pèlerins pour Jérusalem au temps des croisades. Afin de mener à bien ses missions, il constitua à travers l’Europe chrétienne à partir de dons fonciers, un réseau de places fortes appelés commanderies (telle [[La Couvertoirade]]). L’Ordre s'enrichit et devint un partenaire financier, même pour le trésor royal ce qui entrainera sa perte.


(Février 1791)
===les Hospitaliers de Jerusalem===
[[Fichier:Camps de Jalès 1791.JPG|thumb|upright=0.7|Appel aux citoyens.|alt=]]
{{…}}
À la disparition de l’Ordre du Temple, ses biens sont repris par l’[[Ordre de Saint-Jean de Jérusalem]].
Le [[bailli de Suffren]] fut le dernier Commandeur de cet Ordre et il fut inhumé dans l'église du temple<ref>http://www.le-gigan.org/othm/75003.htm </ref> à Paris.
[[File:Pierre André de Suffren gravurefr.jpeg|thumb|center|upright=0.7|le bailly de Suffren]]


{{citation|À l'initiative de Louis Bastide de Malbos, maire de Berrias, une réunion préparatoire a lieu le {{date-|13 février 1791}}. Le principe du rassemblement est décidé, les convocations envoyées.
==La période révolutionnaire==
Dans l'intervalle, ce sont des catholiques qui à la suite d’événements survenus à [[Uzès]] et en réaction à la proclamation de la [[Constitution civile du clergé]]<ref>{{lien brisé |url= https://books.google.fr/books?id=hh7IUoZuVuMC&pg=PA58&lpg=PA58&dq=les+camps+de+jal%C3%A8s&source=bl&ots=LTloIqtsqz&sig=aZ5Wesq3IfWNTc7X8JAeVOyTFIg&hl=fr&ei=OPHWTNK7EsqNjAftmpytCQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=4&ved=0CCwQ6AEwAzgK#v=onepage&q=les%20camps%20de%20jal%C3%A8s&f=false |titre= Ouvrage inexistant sur Google Books |brisé le=12-03-2020}}.</ref> demandent, par la voix de Malbosc, la protection des gardes nationaux des villages alentour et se réfugient à Jalès}}(Mazon-Histoire de Largentière-{{p.|395}}).
===Le premier camp===
{{…}}
Le 18 août 1790, à l'appel de Louis-Bastide de Malbosc , maire de Berrias , commune sur laquelle est implantée la commanderie templière de Jalès, se réunissent plusieurs milliers de catholiques en réponse aux événements survenus à [[Nîmes]], où des [[protestants]], majoritairement favorables aux idées progressistes massacrérent des catholiques.
Ce rassemblement pouvait passer pour une fête locale à l'image de la célébration dite [[Fête de la Fédération]] du 14 juillet 1790 à Paris.


Et l'on y chantait la chanson du Camp de Jalès<ref>{{lien web |titre=Chants royalistes - Chanson du Camp de Jalès 1791<!-- Vérifiez ce titre --> |url=http://chants.royalistes.free.fr/index.php?id=40 |site=chants.royalistes.free.fr |consulté le=09-06-2023}}.</ref>.
Les maires de l'Ardèche méridionale, leurs conseillers et leurs gardes nationaux se réunissent et proclament leur fidélité au Roi.


Le Directoire du département de l’Ardèche s’oppose à cette décision.
Cependant,après le départ des gardes, certains s'organisent et leurs officiers se proclament [[Etat-major]] ou "Comité Militaire" d'une "Armée Fédérée". Cette démarche est déclarée incontitutionnelle par l'Assemblée Nationale à la demande du Directoire du Département de l'Ardèche dans un décret du 7 Septembre 1790 promulgué par le Roi le 12 Septembre.
Le 17 février, il écrit aux municipalités, leur demandant la plus grande prudence et signalant le risque de manipulation et après l'échec d'un contre-rassemblement des gardes nationales dans la plaine de [[Laurac-en-Vivarais|Laurac]] en vue du maintien de l’ordre et de la légalité, le 19 février, il demande l'aide des garnisons de la Drôme car il n'a pas confiance en la loyauté des troupes ardéchoises. Parallèlement, le Directoire du Gard demande que le régiment du Soissonnais basé à [[Montélimar]] soit déplacé vers [[Pont-Saint-Esprit]]<ref>Paul Messié, op cité</ref>.<br />
Un détachement de cent gardes fut installé en garnison à [[Barjac (Gard)|Barjac]].


D’après l’abbé Étienne<ref>''Notice sur la Paroisse de Ribes'', op cité</ref>{{citation|la paroisse de [[Ribes (Ardèche)|Ribes]] débouche au col de Vinchannes et menace de mettre le feu à Joyeuse si on s’oppose à ce qu’elle se réunisse aux autres paroisses}}. Le maire de Joyeuse, Dussargues de Planzolles renonce à y faire obstacle.
Dés lors tout rassemblement dans la plaine de Jalès et dans tout le Royaume deviens illégal, sauf autorisation du Directoire Départemental.


Les affrontements se multiplient, les catholiques faisant pression sur les municipalités protestantes, les gardes nationales sur les municipalités accusées de tiédeur patriotique. Dans plusieurs villes les protestants déposent les armes en signe de bonne volonté.<br />
===Le deuxième camp===
Cependant, les gardes favorables au Comité de Jalès se rassemblent en masse, souvent en opposition avec des municipalités favorables au Directoire départemental.
{{…}}


À Joyeuse, malgré la présence des représentants du district du [[Tanargue]], les gardes nationaux forcent la municipalité à les autoriser à partir vers Jalès. Les {{nombre|15000|gardes}} (Albin Mazon parle de {{nombre|35000}} dans son ''Histoire de Largentière'') sont rassemblés dans la plaine de Jalès, mais, convaincus de temporiser, ils éliront un « général » [[Joachim Chastanier de Burac|Chastanier de Burac]]<ref>{{lien web |titre=Généraux |url=http://thierry.pouliquen.free.fr/Generaux/gnxC.htm |site=thierry.pouliquen.free.fr |consulté le=09-06-2023}}.</ref>, qui les convaincra de renoncer à marcher sur Uzès et se disperseront progressivement.
(février 1791)
[[File:Camps de Jalès 1791.JPG|thumb|center|upright=0.7|Appel aux citoyens]]
Cette fois ce sont des catholiques sous la protection de [[milices ]] des villages alentours qui se réfugient à Jalès, en dépit des injonctions du [[Directoire]] du département de l'Ardèche à la suite d'événements survenus à [[Uzès]] et en réaction à la proclamation de la Constitution Civile du Clergé.


Les armées régulières renforcées par des gardes nationaux « patriotes » commandées par [[Louis Alexandre d'Albignac]] (Nîmes), les deux compagnies du régiment des chasseurs de Roussillon sous les ordres du lieutenant-colonel des Ours de Mandajors (Alais), et de la Légion de [[Pont-Saint-Esprit]] sous les ordres de Legrand, ancien officier du régiment d'Angoumois à la demande des municipalités, convergent vers Jalès malgré les conseils du Directoire. Elles ne rencontreront pas de résistance. Seules les troupes de Legrand, à la demande de Dussargues maire de [[Joyeuse (Ardèche)|Joyeuse]] investissent Jalès , saccagent les lieux, détruisent les archives et arrêtent le maire [[Louis Bastide de Malbos|Malbosc]] contre l’avis des représentants du Directoire. Il est emprisonné à Pont-Saint-Esprit. Il meurt au cours d’une « tentative d'évasion », peut être « suicidé »<ref>« (...) Malheureusement la trahison fit avorter ce plan ; la fédération fut disloquée avant d'avoir combattu ; [[Louis Bastide de Malbos|Malbos]] fut lâchement étranglé dans sa prison et les jacobins triomphèrent. (...) » ''in'' {{Ouvrage |auteur1=Gustave Gautherot |titre=[[Institut Catholique de Paris]], Histoire de la [[Révolution française]], Cours public de M. Gustave Gautherot, 18 février, 12{{e}} conférence |sous-titre=La [[contre-révolution]] sous la [[Assemblée constituante de 1789|Constituante]], le Camp de Jalès |éditeur=[[La Croix]] |lieu=Paris |année=19 février 1911 |lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k257922r/f3.item.r=%22Louis%20Bastide%20de%20Malbos}}</ref>{{,}}<ref>« (...) M. de Malbos, père, fut président du comité qui provoqua le premier rassemblement contre-révolutionnaire de Jalès, (...). [[Louis Bastide de Malbos|M. de Malbos]], père, fut une des victimes des évènements de cette époque si tourmentée. Arrêté, conduit au [[Pont-Saint-Esprit]], il fut, pendant la nuit, précipité dans le [[Rhône (rivière)|Rhône]] (...) » ''in'' {{Ouvrage |auteur1=Henry Vaschalde |titre=Bulletin de la Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche |sous-titre=Histoire des poètes du Vivarais, suite - [[Jules de Malbos]] (1782-1867) |éditeur=Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche |lieu=Privas |année=1876 |lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k445401r/f116}}</ref> par ses geôliers (l’hypothèse d’une vengeance d’anciens bandits masqués de [[1783]], libérés des galères a été évoquée par M. Guerreau ou Paul Messié dans la Revue du Vivarais).
===Le Troisième camp===
{{…}}


=== Le troisième camp : la contre-révolution ===
(Juillet 1792) '''La conspiration de Saillans'''.
[[Fichier:CampJalesRun.jpg|thumb|left|Prise du château de Banne.|alt=]]
(Juillet 1792) '''La conspiration de Saillans'''<ref>{{lien web |auteur1=ADG Soft - Image-in-air.fr - Place de l'église - 07460 Berrias et Casteljau - Tel 06.34.07.64.28 |titre=Berrias et Casteljau en Ardeche méridionale. Site officiel. Commune située au…<!-- Vérifiez ce titre --> |url=http://www.berrias-et-casteljau.fr/article.php3?id_article=283 |site=berrias-et-casteljau.fr |consulté le=09-06-2023}}.</ref>.
Cette conjuration semble purement [[Contre-révolution|contre-révolutionnaire]], longuement mûrie par l'abbé [[Claude Allier]], les Princes émigrés et le [[François-Louis de Saillans|comte de Saillans]].


Saillans tenait garnison à [[Largentière]] lors du deuxième camp de Jalès. Il aurait dû participer à sa répression sous les ordres du colonel des Ours de Mandajors qui préfère se passer de son aide. Au mois de décembre 1791, à [[Perpignan]] , il tente de soulever son régiment. Il est décrété d’arrestation le 3 janvier 1792 et se réfugie à Coblence (Charles Jolivet, p. 356).
Saillans tenait garnison à [[Largentière]] lors du deuxième camp de Jalès. Il aurait dû participer à sa répression sous les ordres du colonel des Ours de Mandajors qui préfère se passer de son aide. Au mois de décembre 1791, à [[Perpignan]], il tente de soulever son régiment. Il est décrété d’arrestation le 3 janvier [[1792]] et se réfugie à Coblence<ref>{{harvsp|Jolivet|1930|p=356}}</ref>.
Claude Allier, prieur de [[Chambonas]], se rend à [[Coblence]] en février 1792 .aux Princes un plan de soulèvement. Dès le 4 mars, les émigrés nomment [[Conway]] pour prendre la tête de l’armée du Midi et lui adjoignent le comte de Saillans qui connaît bien le pays.
Claude Allier, prieur de [[Chambonas (Ardèche)|Chambonas]] et monarchiste [[prosélyte]]<ref>Valérie Sottocasa, ''Dictionnaire de la Contre-Révolution'', sous la direction de [[Jean-Clément Martin]], Perrin 2011, p.42</ref>, qui recrute activement depuis des mois, se rend à [[Coblence]] en {{nobr|février 1792}} pour soumettre aux Princes un plan de soulèvement. Dès le {{nobr|4 mars}}, les émigrés nomment [[Thomas Conway|Conway]] pour prendre la tête de l’armée du Midi et lui adjoignent le comte de Saillans qui connaît bien le pays. Son objectif, suivant les conseils du comte d’Artois, futur [[Charles X de France|{{nobr|Charles X}}]] : rétablir l’ancien régime malgré l’opposition du Roi.
Son objecif, suivant les conseils du [[comte d'Artois]], futur[[ Charles X]]: rétablir l'ancien régime malgré l'opposition du Roi.
En dépit des conseils des princes et de Conway , Saillans fait le siège du fort de [[Banne]] le 4 Juillet, le prends le 8 .Le directoire dudépartement de l'Ardèche réunit à Joyeuse ne troupe d'environ 10.000 hommes sous le commandement du général d'[[Louis Alexandre d'Albignac|Albignac]]. Après quelques escarmouches, entre Joyeuse et Jalès, les rebelles se dispersent, le fort de Banne est repris le 12 et détruit.Saillans en fuite sera repris , conduit aux [[Les Vans | Vans]] et décapité ainsi que plusieurs de ses complices.


{{refnec|Il y eut peut-être une mauvaise appréciation de la volonté des catholiques de la région de s'opposer aux nouvelles institutions}}, toujours est-il que Saillans réunit à peine {{formatnum:1500}} partisans, là où il en attendait {{formatnum:20000}}.
[[File:CampJalesRun.jpg|thumb|upright=0.7|center]]


En dépit des conseils des princes et de Conway, Saillans aidé du chevalier Isidore de Melon et de Joseph Marie [[:Fichier:Chabalier blason.png|Chabalier]], assiègent le fort de [[Banne]] le 4 juillet, pour le prendre le 8. Le Directoire du département de l’Ardèche réunit à Joyeuse une troupe de {{unité|8000|hommes}} sous le commandement du général [[Louis Alexandre d'Albignac|d’Albignac]]. Après quelques escarmouches, entre [[Joyeuse (Ardèche)|Joyeuse]] et Jalès, les rebelles se dispersent grâce à un violent orage, le fort de [[Banne]] est repris le 12 et détruit. Saillans en fuite sera repris, conduit aux [[Les Vans|Vans]] et décapité sans jugement ainsi que plusieurs de ses complices. Son crâne aurait été ramené au bout d'une pique à [[Largentière]] (Ardèche) où il est encore visible sur un pilier de l'église [[Église Notre-Dame-des-Pommiers (Largentière)|Notre-Dame des Pommiers]].
== Bibliographie ==
[[File:Crane de Saillans 027.jpg|thumb |Crâne de Saillans à Largentière (Église N-D des Pommiers).]]
Le 13 juillet, à Joyeuse, deux membres de la conspiration, l'abbé de La Bastide de la Mollette et le chevalier d'Entremeaux sont massacrés sous les yeux de [[François-Antoine de Boissy d'Anglas|Boissy d'Anglas]] <ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=Anatoli Ado |titre=Paysans en révolution |sous-titre=Terre, pouvoir et jacquerie (1789-1794) |éditeur= |année=2012 |pages totales=474 |passage=311 |isbn=978-2-908327-38-0 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=EJUbPkuMPa8C&pg=PA311&q=comte+Saillans}}.</ref>.


Le 18 juillet, l’Assemblée nationale après avoir entendu la lecture de pièces qui lui ont été adressées par le Directoire du département de l’Ardèche déclare l’accusation de 57 personnes, dont Conway, Claude Allier, prieur de Chambonas, Ducros, maire de [[Berrias-et-Casteljau|Berrias]]{{etc}} ; le décret est promulgué par Louis XVI le 20 juillet.
* {{ouvrage |langue= |prénom1= Abbé Charles |nom1= Jolivet |lien auteur1= |titre= La Révolution dans l'Ardèche 1788-1795 |sous-titre= |numéro d'édition= |éditeur= imprimerie E.Mazel |lien éditeur= |lieu= Largentière |jour= |mois= |année= 1930 |volume= |tome= |pages totales= |passage= |isbn= |lire en ligne= |consulté le= }}
Plusieurs seront pris, jugés et guillotinés à [[Mende (Lozère)|Mende]] (Claude Allier), [[Privas]], Joyeuse{{etc.}}
* {{ouvrage| langue =fr| prénom1 =Alice | nom1 =Saunier-Seïté| lien auteur1 =Alice Saunier-Seité| titre = Le Comte Boissy d'Anglas| sous-titre =| numéro d'édition =| éditeur =éditions France Univers| lien éditeur =| lieu =| jour =| mois =| année =2001| volume =| tome =| pages totales=359| passage=120| isbn =2914437013| lire en ligne =http://books.google.fr/books?id=duiXjllxCxEC&source=gbs_navlinks_s| consulté le =5 mai 2010}}
Le Directoire départemental dont l'action fut jugée inefficace par l'Assemblée nationale, fut entièrement renouvelé ainsi que de nombreuses municipalités de la région.
* [[Firmin Boissin]] : ''Les Camps de Jalès'', 1885.
* Firmin Boissin : ''Jan de la Lune'', 1887.
*[[François-Antoine de Boissy d'Anglas| Boissy d'Anglas]] et les régicides . par Boissy d'Anglas- d'après des documents officiels et des papiers de famille Boissy d'Anglas, François-Antoine (1846-1921) Impr. de E. Cellier (Annonay).Ed-1905.


Pendant plusieurs mois, la poursuite de personnes suspectes de participation à cette conspiration fut le prétexte d'actes de brigandage, d'exécutions sommaires et de sac de propriétés privées.
* Emmanuel Vingtrinier. La Contre-Révolution. Première période. 1789-1791.Emile Paul Ed. Paris.1934-1935.


[[Albin Mazon]] évoque la persistance d'actes de brigandage et de [[chouannerie]] dans la région du [[Tanargue]] jusqu'en [[1800]] : des bandits à la [[Cocarde|cocarde blanche]] rançonnent les voyageurs, pillent les caisses publiques. Ils auraient été commandés par [[Dominique Allier]] et par le marquis de Surville<ref>{{lien web |titre=Joseph Etienne de SURVILLE (1755-1798)<!-- Vérifiez ce titre --> |url=https://archive.wikiwix.com/cache/20110224021720/http://www.medarus.org/Ardeche/07celebr/07celTex/surville_jj.htm |site=[[Wikiwix]] |consulté le=09-06-2023}}.</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=Michel Riou |titre=Ardèche, terre d'histoire |sous-titre=histoire de l'Ardèche et de l'ancien Vivarais |éditeur= |année=2007 |pages totales=365 |passage=226 |isbn=978-2-84206-382-5 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=Tfm33DFSAOQC&pg=PT226&q=assembl%C3%A9e+d%C3%A9partementales+de+1790}}.</ref>, le réel auteur des Poésies de [[Marguerite-Eléonore Clotilde de Vallon-Chalys de Surville|Clotilde de Surville]] qui, capturé, fut fusillé au Puy en 1798. Dominique Allier, frère du prieur de Chambonas fut capturé et exécuté en septembre 1798.
==Liens Externes==
L'abbé Étienne note que la paroisse de Ribes fut inquiétée par des chouans, les uns monarchistes, les autres jacobins, et qu'il fallut l'intervention de 400 soldats de Montchauffé pour venir à bout, non sans commettre quelques excès, de ces brigandages.<br />
* http://ahrf.revues.org/1498
Des villes comme [[Barjac (Gard)|Barjac]], [[Joyeuse (Ardèche)|Joyeuse]], [[Pont-Saint-Esprit]] furent momentanément occupées. Ces épisodes constituent ce qu'il est convenu d'appeler la [[ Terreur blanche (France)|Terreur blanche]] avec deux années cruciales : 1795 puis 1799.

[[File:Ruines du Chateau de Banne 07460.jpg|Ruines du Chateau de Banne 07460|thumb]]

[[File:Décret d'accusation.pdf|thumb|Décret d'accusation contre les participants du troisième Camp de Jales (Juillet 1792).]]


== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}
{{Références|colonnes=2}}
== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===

* {{Ouvrage | prénom1=Abbé Charles | nom1=Jolivet | titre=La Révolution dans l'Ardèche 1788-1795 | éditeur=imprimerie E.Mazel | lieu=Largentière | année=1930 }}
* {{Ouvrage | prénom1=Alice | nom1=Saunier-Seïté | lien auteur1=Alice Saunier-Seité | titre=Le Comte Boissy d'Anglas | éditeur=éditions France Univers | lieu=Clichy | année=2001 | pages totales=359 | passage=120 | isbn=978-2-914437-01-1 | isbn10=2914437013 | lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=duiXjllxCxEC | consulté le=5 mai 2010}}
* [[Firmin Boissin]] : ''Les Camps de Jalès'', 1885.
* {{Ouvrage | auteur1=[[Firmin Boissin]] | titre=Jan de la Lune | éditeur=Albert Savine Ed. | lieu=Paris, Nouvelle Librairie Parisienne | année=1887 }}
* {{article|prénom1=Jean|nom1=Règnè|titre=Les prodromes de la Révolution dans l'Ardèche et dans le Gard|sous-titre=une relation inédite de la révolte des Masques Armés dans le Bas-Vivarais pendant les années 1782-1783|périodique=Revue historique de la Révolution française et de l'Empire|éditeur=Largentière|mois=octobre–décembre 1915,|année=1916}}
* ''Boissy d'Anglas et les régicides''. par [[François-Antoine de Boissy d'Anglas|Boissy d'Anglas]] – d'après des documents officiels et des papiers de famille Boissy d'Anglas, François-Antoine (1846-1921) Impr. de E. Cellier (Annonay).Ed-1905.
* {{Ouvrage | prénom1=Emmanuel | nom1=Vingtrinier | titre=La Contre-Révolution | titre volume=Première période (1789–1791) | éditeur=Émile Paul Ed | lieu=Paris | année=1934-1935 | isbn=}}
* {{Ouvrage | prénom1=Abbé V. | nom1=Etienne | titre=Notice sur la paroisse de Ribes | sous-titre=Extrait de la [[Revue du Vivarais]] | éditeur=imprimerie Habauzit | lieu=Aubenas | année=1941 }}
* {{Ouvrage | auteur1=[[François Lebrun]] | prénom2=Roger | nom2=Dupuis | titre=Les résistances à la Révolution | éditeur=Imago.Éd | année=1987 | isbn=}}
* {{Ouvrage | prénom1=Marcel | nom1=Lecoq | titre=La Contre-Révolution dans le midi, 1790_1798 | éditeur=Ed.de la Croisade | lieu=Paris | année= | numéro d'édition=2 | pages totales=275 | isbn= | lire en ligne=https://archive.org/details/lacontrervolut00lecouoft}}
* {{Ouvrage | auteur1=[[Albin Mazon]] | titre=Histoire de Largentière | volume=chapitre VIII | éditeur=Imprimerie Constant Laurent | lieu=Privas | année=1904 }}
* {{Ouvrage | auteur1=[[Albin Mazon]] | titre=L'ancienne paroisse de Jaujac | éditeur=Imprimerie Générale de l'Ardèche | année= | isbn= | lire en ligne=lien}}
* {{article|prénom1=M.|nom1=Guerreau|titre=Le Vivarais à la veille de la Révolution, les |périodique=[[Revue du Vivarais]]|volume=LXXV|numéro=4|année=1971}}
* {{article|prénom1=M.|nom1=Guerreau|titre=L’assasinat de Louis Bastide de Malbosc, les responsables|périodique=[[Revue du Vivarais]]|volume=LXXVI|numéro=1|année=1972}}
* {{article|prénom1=M.|nom1=Guerreau|titre=Résurrection de la Jacquerie |périodique=[[Revue du Vivarais]]|volume=LXXVI|numéro=2|année=1972}}
* {{article|prénom1=Paul|nom1=Mesié|titre=En marge du camp de Jalès|périodique=[[Revue du Vivarais]]|volume=LV|numéro=1|année=1951|pages=7 à 17}}
* {{article|prénom1=Daniel.|nom1=Le Blevec|titre=Les Templiers en Vivarais: les Archives de la Commanderie de Jalès et l'implantation de l'Ordre du Temple en Cévennes.|périodique=[[Revue du Vivarais]]|volume=LXXXIV|numéro=1|mois=janvier-mars|année=1980}}
* {{Ouvrage| prénom1=Robert| nom1=[[ Robert Saint-Jean |Saint-Jean]]| titre=La commanderie de Jales : les bâtiments du {{s mini|XII|e}}-{{s mini|XVIII|e}}siècles| éditeur=[[Revue du Vivarais]]| année=| passage=53-80| isbn=| numéro chapitre=689}}
* {{Ouvrage | prénom1=M. | lien auteur1=collectif | titre=La Commanderie Templière de Jalès | sous-titre=Flânerie historique en Ardèche | éditeur=Les guides du Patrimoine Rhônalpin | lieu=Lyon | année=2008 | mois=juin | isbn= | issn=0298-4695 | numéro chapitre=41}}

=== Liens externes ===
* [http://ahrf.revues.org/1498 François de Jouvenel : Les Camps de Jalès]
* [https://books.google.fr/books?id=duiXjllxCxEC&pg=PA121&lpg=PA121&dq=camps+de+jal%C3%A8s&source=bl&ots=WHQOxW_MeN&sig=DQc7_ddK2siExcabNuIAxXm8dwc&hl=fr&ei=mr9iTIymJZOI4Qb3qsWzCg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=9&ved=0CFIQ6AEwCA#v=onepage&q=camps%20de%20jal%C3%A8s&f=false Boissy d'Anglas, par Alice Saunier-Seïté : Les Camps de Jalès]


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L'appellation camps de Jalès fait référence à une série d’événements qui se sont déroulés immédiatement après la Grande Peur au début de la période révolutionnaire, entre et en Ardèche, sur le territoire des communes de Banne, Beaulieu et Berrias-et-Casteljau, dans le canton des Vans.

Il ne s'agit pas d'un mouvement isolé, mais de manifestations proches de celles que l’on retrouve dans l’Ain, le Comtat Venaissin, Arles, d’abord dans un contexte fédératif puis évoluant vers une réaction contre-révolutionnaire, souvent à la suite d’affrontements entre catholiques et protestants (Nîmes, Uzès).

Le pays de Jalès

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Le pays se situe à la limite entre l’Ardèche (Vivarais) et le Gard, à proximité d’Alès, du pays d’Uzège. La plaine de Jalès est aussi une zone de contact entre catholiques et protestants, marquée par la présence ancienne des templiers et la proximité des Cévennes protestantes.

La période révolutionnaire

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Le contexte : la Révolte des Masques armés

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En 1782 et 1783, des bandits masqués sévirent entre les Vans[1] et Saint-Ambroix (Gard), nécessitant l’envoi de troupes commandées par Henri Cabot de Dampmartin. Cette révolte contre la bourgeoisie était le fait de pauvres gens. Les responsables furent pendus ou roués aux Vans le 25 octobre 1783, certains envoyés aux galères[2],[3],[4]. Beaucoup furent néanmoins graciés.

Albin Mazon, dans sa notice sur l'ancienne paroisse de Jaujac [5], raconte que l'un des condamnés à la roue l'avait été par contumace. Il s'appelait Degout-Lachamp et se serait caché dans les bois jusqu'en 1789, puis à la faveur des événements aurait eu une activité de brigandages avec d'anciens complices jusqu'en 1796, date à laquelle il aurait été repris à la faveur d'un complot royaliste qu'il aurait voulu dénoncer.

Le premier camp : fête fédérative et défense des catholiques

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C'est le 11 juillet 1790, au château du comte du Roure à Banne, que les membres des conseils municipaux des communes voisines demandent que l'Assemblée constituante soit chargée d'organiser un rassemblement des gardes nationaux[6].

Le 18 août, à l’appel de Louis Bastide de Malbos[7], maire de Berrias, commune sur laquelle est implantée la Commanderie de Jalès, se réunissent 15 000 à 20 000 gardes nationaux et plusieurs milliers de catholiques en réponse aux événements survenus à Nîmes, où des protestants, majoritairement favorables aux idées progressistes massacrèrent des catholiques.
Ce rassemblement pouvait passer pour une fête locale à l’image de la célébration dite Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à Paris. Rivière de Larque, procureur syndic de Largentière, tente de tirer un avantage politique de cette manifestation. Il y eut peut-être quiproquo entre ceux qui venaient défendre la religion catholique et ceux qui voulaient fêter les idées nouvelles ?[réf. nécessaire]

Une messe est célébrée. Certains veulent marcher sur Nîmes, mais cette éventualité est écartée par les organisateurs.

Toutes les villes de l'Ardèche méridionale y étaient représentées à l'exception de Joyeuse[8].

Scan d'un document original.

Les maires de l’Ardèche méridionale, leurs conseillers et leurs gardes nationaux se réunissent et proclament leur fidélité au Roi[9].

Cependant, après le départ des gardes, certains s’organisent et leurs officiers se proclament état-major ou comité militaire d’une armée fédérée. Cette démarche est déclarée inconstitutionnelle par l’Assemblée nationale à la demande du Directoire du département de l’Ardèche (proclamation du 26 août 1790) dans un décret du 7 septembre 1790 promulgué par le roi le 12 septembre.

Ce comité dont le principal élément est Claude Allier, prieur de Chambonas, sera le fil rouge reliant le premier rassemblement aux deux autres. Il fait l'amalgame entre les protestants et les patriotes qui accaparent tous les postes et relèguent les catholiques à des fonctions subalternes. Le prieur de Chambonas, catholique et monarchiste, sera un lien avec les princes émigrés.

Dès lors, tout rassemblement - que ce soit dans la plaine de Jalès ou dans tout le Royaume - devient illégal, sauf autorisation du Directoire départemental.

Le deuxième camp : réaction religieuse

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(Février 1791)

Appel aux citoyens.

« À l'initiative de Louis Bastide de Malbos, maire de Berrias, une réunion préparatoire a lieu le . Le principe du rassemblement est décidé, les convocations envoyées. Dans l'intervalle, ce sont des catholiques qui à la suite d’événements survenus à Uzès et en réaction à la proclamation de la Constitution civile du clergé[10] demandent, par la voix de Malbosc, la protection des gardes nationaux des villages alentour et se réfugient à Jalès »(Mazon-Histoire de Largentière-p. 395).

Et l'on y chantait la chanson du Camp de Jalès[11].

Le Directoire du département de l’Ardèche s’oppose à cette décision. Le 17 février, il écrit aux municipalités, leur demandant la plus grande prudence et signalant le risque de manipulation et après l'échec d'un contre-rassemblement des gardes nationales dans la plaine de Laurac en vue du maintien de l’ordre et de la légalité, le 19 février, il demande l'aide des garnisons de la Drôme car il n'a pas confiance en la loyauté des troupes ardéchoises. Parallèlement, le Directoire du Gard demande que le régiment du Soissonnais basé à Montélimar soit déplacé vers Pont-Saint-Esprit[12].
Un détachement de cent gardes fut installé en garnison à Barjac.

D’après l’abbé Étienne[13]« la paroisse de Ribes débouche au col de Vinchannes et menace de mettre le feu à Joyeuse si on s’oppose à ce qu’elle se réunisse aux autres paroisses ». Le maire de Joyeuse, Dussargues de Planzolles renonce à y faire obstacle.

Les affrontements se multiplient, les catholiques faisant pression sur les municipalités protestantes, les gardes nationales sur les municipalités accusées de tiédeur patriotique. Dans plusieurs villes les protestants déposent les armes en signe de bonne volonté.
Cependant, les gardes favorables au Comité de Jalès se rassemblent en masse, souvent en opposition avec des municipalités favorables au Directoire départemental.

À Joyeuse, malgré la présence des représentants du district du Tanargue, les gardes nationaux forcent la municipalité à les autoriser à partir vers Jalès. Les 15 000 gardes (Albin Mazon parle de 35 000 dans son Histoire de Largentière) sont rassemblés dans la plaine de Jalès, mais, convaincus de temporiser, ils éliront un « général » Chastanier de Burac[14], qui les convaincra de renoncer à marcher sur Uzès et se disperseront progressivement.

Les armées régulières renforcées par des gardes nationaux « patriotes » commandées par Louis Alexandre d'Albignac (Nîmes), les deux compagnies du régiment des chasseurs de Roussillon sous les ordres du lieutenant-colonel des Ours de Mandajors (Alais), et de la Légion de Pont-Saint-Esprit sous les ordres de Legrand, ancien officier du régiment d'Angoumois à la demande des municipalités, convergent vers Jalès malgré les conseils du Directoire. Elles ne rencontreront pas de résistance. Seules les troupes de Legrand, à la demande de Dussargues maire de Joyeuse investissent Jalès , saccagent les lieux, détruisent les archives et arrêtent le maire Malbosc contre l’avis des représentants du Directoire. Il est emprisonné à Pont-Saint-Esprit. Il meurt au cours d’une « tentative d'évasion », peut être « suicidé »[15],[16] par ses geôliers (l’hypothèse d’une vengeance d’anciens bandits masqués de 1783, libérés des galères a été évoquée par M. Guerreau ou Paul Messié dans la Revue du Vivarais).

Le troisième camp : la contre-révolution

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Prise du château de Banne.

(Juillet 1792) La conspiration de Saillans[17]. Cette conjuration semble purement contre-révolutionnaire, longuement mûrie par l'abbé Claude Allier, les Princes émigrés et le comte de Saillans.

Saillans tenait garnison à Largentière lors du deuxième camp de Jalès. Il aurait dû participer à sa répression sous les ordres du colonel des Ours de Mandajors qui préfère se passer de son aide. Au mois de décembre 1791, à Perpignan, il tente de soulever son régiment. Il est décrété d’arrestation le 3 janvier 1792 et se réfugie à Coblence[18].

Claude Allier, prieur de Chambonas et monarchiste prosélyte[19], qui recrute activement depuis des mois, se rend à Coblence en février 1792 pour soumettre aux Princes un plan de soulèvement. Dès le 4 mars, les émigrés nomment Conway pour prendre la tête de l’armée du Midi et lui adjoignent le comte de Saillans qui connaît bien le pays. Son objectif, suivant les conseils du comte d’Artois, futur Charles X : rétablir l’ancien régime malgré l’opposition du Roi.

Il y eut peut-être une mauvaise appréciation de la volonté des catholiques de la région de s'opposer aux nouvelles institutions[réf. nécessaire], toujours est-il que Saillans réunit à peine 1 500 partisans, là où il en attendait 20 000.

En dépit des conseils des princes et de Conway, Saillans aidé du chevalier Isidore de Melon et de Joseph Marie Chabalier, assiègent le fort de Banne le 4 juillet, pour le prendre le 8. Le Directoire du département de l’Ardèche réunit à Joyeuse une troupe de 8 000 hommes sous le commandement du général d’Albignac. Après quelques escarmouches, entre Joyeuse et Jalès, les rebelles se dispersent grâce à un violent orage, le fort de Banne est repris le 12 et détruit. Saillans en fuite sera repris, conduit aux Vans et décapité sans jugement ainsi que plusieurs de ses complices. Son crâne aurait été ramené au bout d'une pique à Largentière (Ardèche) où il est encore visible sur un pilier de l'église Notre-Dame des Pommiers.

Crâne de Saillans à Largentière (Église N-D des Pommiers).

Le 13 juillet, à Joyeuse, deux membres de la conspiration, l'abbé de La Bastide de la Mollette et le chevalier d'Entremeaux sont massacrés sous les yeux de Boissy d'Anglas [20].

Le 18 juillet, l’Assemblée nationale après avoir entendu la lecture de pièces qui lui ont été adressées par le Directoire du département de l’Ardèche déclare l’accusation de 57 personnes, dont Conway, Claude Allier, prieur de Chambonas, Ducros, maire de Berriasetc. ; le décret est promulgué par Louis XVI le 20 juillet. Plusieurs seront pris, jugés et guillotinés à Mende (Claude Allier), Privas, Joyeuse, etc. Le Directoire départemental dont l'action fut jugée inefficace par l'Assemblée nationale, fut entièrement renouvelé ainsi que de nombreuses municipalités de la région.

Pendant plusieurs mois, la poursuite de personnes suspectes de participation à cette conspiration fut le prétexte d'actes de brigandage, d'exécutions sommaires et de sac de propriétés privées.

Albin Mazon évoque la persistance d'actes de brigandage et de chouannerie dans la région du Tanargue jusqu'en 1800 : des bandits à la cocarde blanche rançonnent les voyageurs, pillent les caisses publiques. Ils auraient été commandés par Dominique Allier et par le marquis de Surville[21],[22], le réel auteur des Poésies de Clotilde de Surville qui, capturé, fut fusillé au Puy en 1798. Dominique Allier, frère du prieur de Chambonas fut capturé et exécuté en septembre 1798. L'abbé Étienne note que la paroisse de Ribes fut inquiétée par des chouans, les uns monarchistes, les autres jacobins, et qu'il fallut l'intervention de 400 soldats de Montchauffé pour venir à bout, non sans commettre quelques excès, de ces brigandages.
Des villes comme Barjac, Joyeuse, Pont-Saint-Esprit furent momentanément occupées. Ces épisodes constituent ce qu'il est convenu d'appeler la Terreur blanche avec deux années cruciales : 1795 puis 1799.

Ruines du Chateau de Banne 07460
Décret d'accusation contre les participants du troisième Camp de Jales (Juillet 1792).

Notes et références

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  1. « Les vans (07140) », sur medarus.org (consulté le ).
  2. Règnè 1916
  3. Jean Régnè, op cité
  4. (en) « La Revolte des Masques Armes 1782 », sur Internet Archive (consulté le ).
  5. (pages 244 à 257)
  6. Jolivet 1930
  7. Christian de Seauve, Caraman 1581-1858. Chronique d’une maison l’hôtel de Malbos, son environnement catholique et protestant. Les collectionneurs amateurs 31460 Caraman. 1998
  8. Mazon, Histoire de Largentière, p. 393
  9. (en) « Proces-verbal du premier camp de Jales. : Alain Auzas : Free Download, Borrow, and Streaming : Internet Archive », sur Internet Archive (consulté le ).
  10. « Ouvrage inexistant sur Google Books »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  11. « Chants royalistes - Chanson du Camp de Jalès 1791 », sur chants.royalistes.free.fr (consulté le ).
  12. Paul Messié, op cité
  13. Notice sur la Paroisse de Ribes, op cité
  14. « Généraux », sur thierry.pouliquen.free.fr (consulté le ).
  15. « (...) Malheureusement la trahison fit avorter ce plan ; la fédération fut disloquée avant d'avoir combattu ; Malbos fut lâchement étranglé dans sa prison et les jacobins triomphèrent. (...) » in Gustave Gautherot, Institut Catholique de Paris, Histoire de la Révolution française, Cours public de M. Gustave Gautherot, 18 février, 12e conférence : La contre-révolution sous la Constituante, le Camp de Jalès, Paris, La Croix, (lire en ligne)
  16. « (...) M. de Malbos, père, fut président du comité qui provoqua le premier rassemblement contre-révolutionnaire de Jalès, (...). M. de Malbos, père, fut une des victimes des évènements de cette époque si tourmentée. Arrêté, conduit au Pont-Saint-Esprit, il fut, pendant la nuit, précipité dans le Rhône (...) » in Henry Vaschalde, Bulletin de la Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche : Histoire des poètes du Vivarais, suite - Jules de Malbos (1782-1867), Privas, Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche, (lire en ligne)
  17. ADG Soft - Image-in-air.fr - Place de l'église - 07460 Berrias et Casteljau - Tel 06.34.07.64.28, « Berrias et Casteljau en Ardeche méridionale. Site officiel. Commune située au… », sur berrias-et-casteljau.fr (consulté le ).
  18. Jolivet 1930, p. 356
  19. Valérie Sottocasa, Dictionnaire de la Contre-Révolution, sous la direction de Jean-Clément Martin, Perrin 2011, p.42
  20. Anatoli Ado, Paysans en révolution : Terre, pouvoir et jacquerie (1789-1794), , 474 p. (ISBN 978-2-908327-38-0, lire en ligne), p. 311.
  21. « Joseph Etienne de SURVILLE (1755-1798) », sur Wikiwix (consulté le ).
  22. Michel Riou, Ardèche, terre d'histoire : histoire de l'Ardèche et de l'ancien Vivarais, , 365 p. (ISBN 978-2-84206-382-5, lire en ligne), p. 226.

Bibliographie

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  • Abbé Charles Jolivet, La Révolution dans l'Ardèche 1788-1795, Largentière, imprimerie E.Mazel,
  • Alice Saunier-Seïté, Le Comte Boissy d'Anglas, Clichy, éditions France Univers, , 359 p. (ISBN 978-2-914437-01-1, lire en ligne), p. 120
  • Firmin Boissin : Les Camps de Jalès, 1885.
  • Firmin Boissin, Jan de la Lune, Paris, Nouvelle Librairie Parisienne, Albert Savine Ed.,
  • Jean Règnè, « Les prodromes de la Révolution dans l'Ardèche et dans le Gard : une relation inédite de la révolte des Masques Armés dans le Bas-Vivarais pendant les années 1782-1783 », Revue historique de la Révolution française et de l'Empire, Largentière,‎
  • Boissy d'Anglas et les régicides. par Boissy d'Anglas – d'après des documents officiels et des papiers de famille Boissy d'Anglas, François-Antoine (1846-1921) Impr. de E. Cellier (Annonay).Ed-1905.
  • Emmanuel Vingtrinier, La Contre-Révolution, Première période (1789–1791), Paris, Émile Paul Ed, 1934-1935
  • Abbé V. Etienne, Notice sur la paroisse de Ribes : Extrait de la Revue du Vivarais, Aubenas, imprimerie Habauzit,
  • François Lebrun et Roger Dupuis, Les résistances à la Révolution, Imago.Éd,
  • Marcel Lecoq, La Contre-Révolution dans le midi, 1790_1798, Paris, Ed.de la Croisade, 2e éd., 275 p. (lire en ligne)
  • Albin Mazon, Histoire de Largentière, vol. chapitre VIII, Privas, Imprimerie Constant Laurent,
  • Albin Mazon, L'ancienne paroisse de Jaujac, Imprimerie Générale de l'Ardèche (lien)
  • M. Guerreau, « Le Vivarais à la veille de la Révolution, les », Revue du Vivarais, vol. LXXV, no 4,‎
  • M. Guerreau, « L’assasinat de Louis Bastide de Malbosc, les responsables », Revue du Vivarais, vol. LXXVI, no 1,‎
  • M. Guerreau, « Résurrection de la Jacquerie », Revue du Vivarais, vol. LXXVI, no 2,‎
  • Paul Mesié, « En marge du camp de Jalès », Revue du Vivarais, vol. LV, no 1,‎ , p. 7 à 17
  • Daniel. Le Blevec, « Les Templiers en Vivarais: les Archives de la Commanderie de Jalès et l'implantation de l'Ordre du Temple en Cévennes. », Revue du Vivarais, vol. LXXXIV, no 1,‎
  • Robert Saint-Jean, La commanderie de Jales : les bâtiments du XIIe-XVIIIesiècles, Revue du Vivarais, chap. 689, p. 53-80
  • La Commanderie Templière de Jalès : Flânerie historique en Ardèche, Lyon, Les guides du Patrimoine Rhônalpin, (ISSN 0298-4695), chap. 41

Liens externes

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